jeudi 1 janvier 2015

«Car, me disais-je tout en modérant mes passions par le tabac, passe pour obéir ; si j'obéis volontairement, je ne suis plus esclave ; voilà une pensée qui me relève et sauve l'énergie en même temps que l'ordre. Mais nos brillants messieurs ne s'en tiennent pas à commander ; ils s'appliquent à mépriser ; par mille détails d'intonations et d'attitude, par une furieuse colère et sans précaution, comme celle que l'on exerce seulement contre les choses dans l'ordinaire de la vie. Il est toujours sous-entendu, en ces coutumes militaires, et même il est souvent exprimé ceci : Vous n'êtes rien; votre effigie humaine est effacée à mes yeux ; vos opinions et vos affections ne sont rien pour moi ; et vos discours surtout mesurés et sages, ne sont qu'un bruit importun.»

Mars ou la guerre jugéeAlain. Editions Gallimard (1936)

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