mercredi 26 décembre 2018

PBF 2018.38T : Noël flou (DirectLive du 26 décembre 2018)

Mercredi 26 décembre 2018 à 19H sur Radio-Radio, (hertzien Toulouse : 106.8 Mhz ou sur http://62.210.215.26:8000/xstream ) diffusion d'une nouvelle émission DirectLive de la Petite Boutique Fantasque, qui s'appelle logiquement : Noël flou...


Liste des morceaux diffusés : 

1) Feliz navidad (Wall of the earth)
2) Tangerine (Led Zeppelin)
3) Never let me down (David Jones)
4) Career opportunities (Clash)
5) A hard rain's gonna fall (Brian Ferry)
6) Avalon (Roxy Music)
7) Enjoy yourself (Spécials)
8) One step beyond (Madness)
9) Romeo and Juliet (ELP)
10) My babe (Clifton Chenier)
11) I can't quit (Rolling Stones)
12) Time is on my side (Rolling Stones)
13) Icare (Bad pigeons)
14) Peaches in regalia (Franck Zappa)

Pour ceux qui auraient piscine indienne, ou toute autre obligation, il y aura possibilité de rattrapage avec les podcasts:

http://radioradiopodcast.net/…/LA_PETITE_BOUTI…/podcasts.php

Et pendant ce temps-là (7)


dimanche 23 décembre 2018

«[...] le personnage de Don Juan me hante. Faux bon sujet, s'il en fut, car il n'est rien de moins tolérable à la scène que le brave de profession en matière de galanterie, que le matamore de chambre à coucher. Surtout s'il s'agit d'un vieux. Alors le spectacle tourne  l'horrible. L'exhibitionnisme sexuel des vieillards de la littérature est un trait particulier à notre époque.»

D'un bloc-notes à l'autre. François Mauriac. Bartillat (2004) 
«Le public, progressivement, s'effrite. La salle se vide. On repart avec des brides d'un récit, des bouts de textes lacérés. On critique cette forme-là qu'on ne reconnaît pas, qu'on ne comprend pas. Cet essai douteux qui tente de libérer la langue. On a peur de la folie. On a besoin de repères. S'aventurer en de nouveaux territoires créatifs, franchir effrontément les balises établies par les académiciens, ça relève de l'indécence puérile et ça n'a rien d'artistique !
Dans la salle, il ne reste qu'une dizaine de personnes. Claude et Muriel poursuivent un peu pour elles, beaucoup par fierté.»

La Femme qui fuit. Anaïs Barbeau-Lavalette. Éditions Marchand de feuilles (2015)
«Enfin saint Bernard, sentant la mort approcher, dit à ses frères : "Je vous laisse en héritage l'exemple de trois vertus que je me suis efforcé toute ma vie de pratiquer. J'ai toujours évité de scandaliser personne ; j'ai toujours eu moins de confiance en moi-même que dans les autres, et jamais je n'ai tiré vengeance de mes persécuteurs."»

La Légende dorée : Saint-Bernard. Jacques de Voragine. Éditions du Seuil (1998)
«Il en est du vulgaire comme des chiens : faute de connaître la cause de son mal, ils jettent sa rage sur l'instrument ; en sorte que l'instrument porte la peine d'un mal dont il n'est pas la cause principale.»

L'art de la prudence. Balthasar Graciàn. Rivages poche, petite bibliothèque (1994)
«Le bonheur -ce mot que déteste Emmanuel- n'est-ce pas comme cette lumière profuse sur laquelle glisse la petite barque ? Une lumière qui vous porte, vous soulève, vous soutient, sans qu'il soit besoin d'autres effort que de ce léger, léger battement de rames qui vous fait avancer. Mais à peine un instant saisie, la notion de bonheur se vide de contenu. On croit saisir une masse vers quoi se tendent les mains ; mais elles claquent soudain l'une contre l'autre dans le vide, n'ayant rien rencontré. Le bonheur n'est pas une masse mais un point. Il existe, mais sans occuper aucun espace. Les divers éléments qui semblent aujourd'hui le composer : lumière, amour, liberté, n'en constituent que les conditions. Il est sans poids et sans surface. On  ne vit pas en lui, c'est lui qui vit en nous. N'existe-t-il que comme sentiment de ce qui nous manque dans la tristesse ?»

Les reins et les coeurs. Paul-André Lesort. Éditions du Seuil (1964)
«Laissons cela, mais revenons à la France et considérons un peu notre système d'éducation et d'enseignement.
Je suis bien obligé de constater que ce système, ou plutôt ce qui en tient lieu, (car après tout, je ne sais pas si nous avons un système, ou si ce que nous avons peut se nommer système), je suis obligé de constater que notre enseignement participe de l'incertitude générale, du désordre de notre temps. Et même il reproduit si exactement cet état chaotique, cet état de confusion, d'incohérence si remarquable, qu'il suffirait d'observer nos programmes et nos objectifs d'études pour reconstituer l'état mental de notre époque et retrouver tous les traits de notre doute et de nos fluctuations sur toute valeur.»

Variété III, IV et V. Paul Valéry. Gallimard (1936-1944)
«Peut être, dis-je, le dialogue avec ce qui n'est pas l'homme : astres, brins d'herbe, ou grillons, est-il un puissant moyen de négliger la mort.»

Antimémoires. André Malraux. Gallimard (1972)
«La poésie qu'on croit l'expression brute du génie humain en est la décadence lamentable. Le roman est la possibilité d'éviter la poésie comme la peste. La poésie c'est l'ensemble des métastases historiques du genre narratif. La poésie "au début" n'existait pas, il n'y avait que l'épopée qui était un roman chanté, la poésie est l'affaiblissement de l'épopée. Le roman à intrigue solide lutte contre la menace de métastase poétique.»

Ultima necat I : journal intime 1978-1985. Philippe Muray. Les Belles Lettres (2015)
«J'interdis aux marchands de vanter trop leurs marchandises. Car ils se font vite pédagogues et t'enseignent comme but ce qui n'est par essence qu'un moyen, et te trompant ainsi sur la route à suivre les voilà bientôt qui te dégradent, car si leur musique est vulgaire ils te fabriquent pour la vendre une âme vulgaire.»

Citadelle. Antoine de Saint-ÉxuperyÉditions Gallimard (1959)

dimanche 16 décembre 2018

Visionnage parisien en salle (1)


Le Jeu de la pomme. Vera Chytilova (1976)

Résonances contemporaines (21)


«Si on ne veut pas vivre comme des chiens on ne peut qu'être égoïste de nos jours.»

Rashomon. Akira Kurosawa (1950)

PBF 2018.37P : Je cueille les sons échevelés à la mesure champêtre

Mercredi 19 décembre 2018 à 19H sur Radio-Radio, (hertzien Toulouse : 106.8 Mhz ou sur http://62.210.215.26:8000/xstream ) diffusion d'une nouvelle émission de la Petite Boutique Fantasque, sur le Canada français. Après les émissions des Muses galantes sur la Nouvelle France (en collaboration avec Pierre-André), les émissions le PBF sur Michel Brault, nous retournons chez nos cousins d'au-delà des océans avec une émission sur le manifeste du Refus Global. Ce manifeste emblématique du mouvement automatiste québécois a été signé en 1948 par un groupe d'artistes autour Paul-Émile Borduas. On retrouvera sa voix dans cette émission avec celle de Jean-Paul Riopelle autre signataire du Refus global. Geneviève de Mont-Saint-Hilaire au Québec introduira le mouvement et la personnalité de Borduas puis fera lecture du début du texte du Refus global

Liste des morceaux diffusés :

1) Notre sentier (Félix Leclerc)
2) I went to the market (Gilles Vigneault)
3) Bien vite c'est le jour de l'an (La Bolduc)
4) Ginette (Beau Dommage)
5) La Bitt à Tibi (Raoul Dugay)
6) Heureux d'un printemps (Paul Piché)


Pour ceux qui auraient piscine indienne, ou toute autre obligation, il y aura possibilité de rattrapage avec les podcasts:

http://radioradiopodcast.net/…/LA_PETITE_BOUTI…/podcasts.php

dimanche 9 décembre 2018

«Le temps de grâce pour la poésie c'est l'adolescence. Les poètes qui me parlent encore, leur voix traverse les années, elle arrive du fond d'une chambre d'étudiant, elle emprunte l'inflexion étouffée et tendre des morts.
La poésie reste pour moi prisonnière de certaines formes, de certains rythmes hors lesquels ceux qu'on a inventés depuis sont comme de beaux vases poreux qui ne gardent rien. La poésie française s'est engagée chaque jour un peu plus dans un renoncement qui aboutit au silence. Pour moi, elle reste liée humblement à ce que j'ai touché et senti dans mon enfance provinciale et pastorale, à un bourdonnement d'essaim dans les lilas que je prenais à deux mains contre ma bouche. Elle est figurative, comme on dit aujourd'hui de la peinture qui ressemble à quelque chose.»

D'un bloc-notes à l'autre. François Mauriac. Bartillat (2004) 

dimanche 2 décembre 2018

151 : Penser aujourd'hui pour demain, et pour longtemps

«La plus grande prévoyance est d'avoir des heures pour elle. Il n'y a point de cas fortuits pour ceux qui prévoient ; ni de pas dangereux pour ce qui s'y attendent. Il ne faut pas attendre qu'on se noie pour penser au danger, il faut aller au-devant, et prévenir par une mûre considération tout ce qui peut arriver de pis. L'oreiller est une Sibylle muette. Dormir sur une chose à faire vaut mieux que d'être réveillé par une chose faite. Quelques-uns font, et puis pensent ; ce qui est plutôt chercher des excuses que des expédients. D'autres pensent ni devant, ni après. Toute la vie doit être à penser, pour ne se point égarer. La réflexion et la prévoyance donnent la commodité d'anticiper la vie.»

L'art de la prudence. Balthasar Graciàn. Rivages poche, petite bibliothèque (1994)
«Et il y eut un autre jour pluvieux où elle lui dit :
- Je vais passer un moment à Saint-Sulpice... je vais prier les images de Paris pour qu'elles me connaissent et me protègent.
Rodrigue trembla de la voir se perdre dans cette grosse église féroce, détraquée, semblable à un grand dépôt aqueux, à l'éléphantiasis d'une église qui, normale, et sans éléphantiasis, n'eut point paru aussi menaçante, n'eût point eu cet air de grand séjour bouffon et enfumé ; mais malgré toutes ses appréhensions, il la laissa aller.»

La Veuve blanche et noir. Ramon Gomez de la Serna. Éditions Ivrea (1995)
«Tu aimes faire de la route avec Achille parce qu'il te parle. Non : il te fait parler. Ce n'est pas tant ce que tu dis qui l'intéresse. Mais comment tu le dis.
Aussi te demande-t-il de décrire ce que tu vois. Il te fait recommencer jusqu'à ce que la phrase soit parfaite. Les meilleurs mots, le meilleur ordre, la meilleure diction. Jusqu'à ce que ta phrase brille. Même si tu décris quelque chose de sale.»

La Femme qui fuit. Anaïs Barbeau-Lavalette. Éditions Marchand de feuilles (2015)
«Un Allemand qui se rendait avec son fils à Toulouse au tombeau de Jacques en l'an 1020 s'arrêta en route dans la ville de Toulouse. L'hôte, chez qui ils logeaient enivra le père et cacha, dans son sac, un vase d'argent. Le lendemain, comme les pèlerins voulaient repartir, l'hôte les accusa de lui avoir volé un vase qui, en effet, fut retrouvé dans leur sac. Le magistrat devant qui ils furent conduits les condamna à remettre tout leur bien à l'hôte qu'ils avaient voulu dépouiller, et il ordonna, en outre, que l'un des deux eût à être pendu. Après un long conflit où le père voulait mourir pour son fils et le fils pour son père, ce fut le fils qui l'emporta. Il fut pendu, et le père, désolé, poursuivit son pèlerinage. Lorsqu'il revint à Toulouse, trente six jours après, il courut au gibet où pendait son fils, et commença à pousser des cris lamentables. Mais voilà que le fils, lui adressant la parole, lui dit : « Mon cher père, ne pleure pas, car rien de mauvais ne m'est arrivé, grâce à l'appui de Saint-Jacques qui m'a toujours nourri et soutenu ! » Ce qu'entendant, le père courut vers la ville ; et la foule détacha de la potence son fils, qui se trouva en parfaite santé ; et ce fut l'hôte qu'on pendit à sa place.»

La Légende dorée : Saint-Jacques Majeur. Jacques de Voragine. Éditions du Seuil (1998)
« En 1908, Remy de Gourmont me disait qu'en consacrant deux heures par jour à la lecture systématique, on épuiserait non seulement la Bibliothèque Nationale en moins de dix ans, mais encore qu'on aurait fait le tour de toutes les connaissances humaines, tellement les livres se répètent, les auteurs se copiant les uns les autres au point que des secteurs entiers de l'univers des imprimés sont inutiles et que des pans entiers du continent que forme cette immense bibliothèque avec ses millions et ses millions de volumes s'effondrent quand on y fait son trou avec l'entêtement et l'appétit d'un rat ou d'un ver intelligent !...

L'Homme foudroyé. Blaise Cendrars. Éditions Denoël (1945)
«Il n'y a aucune raison pour que la conversation s'arrête jamais. Chacun semble posséder son réservoir inépuisable de banalités, en ouvre et ferme le robinet et les jets se croisent en tous sens comme dans les bassins de Versailles les jours de grandes eaux. Tout le monde parle bruyamment, les enfants à voix suraiguë, les hommes comme s'ils haranguaient des foules, les femmes, comme si elles avaient deux cents gosses à dompter. C'est étourdissant, assourdissant.»

Les reins et les coeurs. Paul-André Lesort. Éditions du Seuil (1964)

Réminiscence personnelle (29)

«L'opéra m'apparaissait un chaos, un usage désordonné de parties lyriques, orchestrales, dramatiques, mimiques, plastiques, chorégraphiques, un spectacle, en somme, grossier, puisque rien ne commandait l'entrée en jeu et le contraste des puissances diverses, que rien n'en limitait l'action, et que le tout de l’œuvre était livré aux inspirations divergentes du librettiste, du musicien, du chorégraphe, du peintre des décors, du metteur en scène et des interprètes.»

Variété III, IV et V. Paul Valéry. Gallimard (1936-1944)
« Et ce système en est en grande partie responsable parce que, comme nous l'avons dit, à force d'obliger les jeunes à répéter comme des perroquets le plus grand nombre possibles de mots, sans jamais leur apprendre à les différencier autrement que par leur sonorité, comme si le sens qu'ils contiennent n'avait aucune importance, ce système d'éducation est arrivé peu à peu à faire perdre aux gens toute faculté de réfléchir sur la signification ou la portée des mots qu'ils disent ou qu'on leur dit.
Cette faculté s'étant atrophiée chez les gens, cependant que subsistait pour eux la nécessité de transmettre leurs pensées de manière plus ou moins exacte, ils se sont vus obligés, en dépit du nombre déjà illimité des mots des langues contemporaines, soit d'emprunter des mots à d'autres langues, soit d'en inventer sans cesse de nouveaux, et tout cela pour aboutir au résultat suivant : lorsqu'un homme contemporain veut exprimer une idée pour laquelle il dispose d'un grand nombre de mots apparemment adéquats et qu'à cette fin il choisit un mot que ses considérations mentales lui désignent comme le plus juste, il éprouve en même temps d'instinct un doute quant à la justesse de son choix, et redonne alors inconsciemment à ce mot le sens subjectif qu'il a toujours plus lui. »

Récits de Belzébuth à son petit-fils : critique objectivement impartiale de la vie des hommes. Georges Ivanovitch Gurdjieff. Stock + plus (1976)
«Je crois que notre relation la plus profonde avec l'art tourné autour de notre relation avec la mort. Mais c'est une relation secrète, une relation avec la mort.»

Antimémoires. André Malraux. Gallimard (1972)
«L'idée de recherche est la source de multiples égarements, elle a poussé l'artiste à des élucubrations purement mentales. Peut être est-ce la principale erreur de l'art moderne. L'art de recherche a empoisonné ceux qui n'ont pas compris tout ce qu'il y avait de positif et de décisif dans cet art, et ont essayé de peindre l'invisible, et par conséquent le non-pictural.»

Ultima necat I : journal intime 1978-1985. Philippe Muray. Les Belles Lettres (2015)
«Car seule est importante et peut nourrir des poèmes véritables la part de vie qui t'engage, qui engage ta faim et ta soif, le pain de tes enfants et la justice qui te sera ou non rendue. Sinon il n'est que jeu et caricature de la vie et caricature de la culture.»

Citadelle. Antoine de Saint-Éxupery. Gallimard (1959)

PBF 2018.36 P : Que jamais on ne sépare / Ceux qui s'aiment simplement


Mercredi 5 décembre 2018 à 19H sur Radio-Radio, (hertzien Toulouse : 106.8 Mhz ou sur http://62.210.215.26:8000/xstream ) nouvelle diffusion d'une émission de la Petite Boutique Fantasque, une émission qui introduit une nouvelle lectrice parisienne Sophie avec des extraits d'un livre bien oublié à présent : Des Reins et des cœurs de Paul-André Lesort (1947). Émission un peu tremblante comme l'image reflétée par la surface de l'eau, gorgée d'émotions simples, dans ce cas précis d'une mère très inquiète de la maladie de sa fille.

Liste des morceaux diffusés :

1) Black is the color (Joan Baez)
2) Méditation (Max Bruch)
3) Nocturne 2 (Francis Poulenc)
4) Improvisation 2 (Francis Poulenc)
5) Nocturne 4 (Francis Poulenc)
6) Prière (Darius Milhaud)
7) Surb, surb (Jan Garbarek / Hilliard ensemble)
8) Lazare et Cécile (Anne Sylvestre)

La photographie est de Nathalie Bagarry
Pour ceux qui auraient piscine indienne, ou toute autre obligation, il y aura possibilité de rattrapage avec les podcasts:

http://radioradiopodcast.net/…/LA_PETITE_BOUTI…/podcasts.php

vendredi 30 novembre 2018

«Elle était vaillante dans sa nudité et ne perdait pas les manières de la femme habillée. Elle ne fermait pas non plus les yeux sur ce qu'elle faisait, et l'on voyait à son expression qu'elle se rendait compte de ce que cela était : le délassement du monde ; ce que tous accomplissent en se cachant.
Elle allait sans révolte ni soumission exagérée. Elle était la femme qui entre dans l'amour, comme dans la mer, sans hésiter.»

La veuve blanche et noir. Ramon Gomez de la Serna. Éditions Ivrea (1995)
«Chantal faisait allusion aux mœurs des hommes, des hommes mariés et singulièrement du sien, Paul Boulingra : l'alcoolisme buté, la tabagie autistique, la paresse sexuelle, la médiocrité financière, la lourdeur sentimentale. Seulement voilà, Julia trouvait que sa sœur avait été particulièrement mal servie en la personne de son Popol. Elle cita des types qui ne buvaient que de l'eau comme le mari à la Trendelino, qui ne fumaient point comme celui de la Foucolle, qui braisaient à houilles rehaussées comme celui de la Panigère, qui gagnaient largement leur vie comme celui de la Parpillon et qui pouvaient avoir pour leur épouse de délicates attentions comme celui de la Foucolle, déjà cité. Sans compter ceux qui savent remettre un plomb, porter les paquets, conduire la voiture, baisser les yeux lorsqu'ils croisent une pute. Julia pensait bien que son militaire serait de cette espèce, et elle en sourit de plaisir. Ce qui agaça Chantal.»

Le Dimanche de la vie
. Raymond Queneau. Éditions Gallimard (1952)
«Je cueille les sons échevelés à la mesure champêtre.
Je cultive les tremblements comme des perles.
Je vis les attentes candides au bord du chavirement.
Poids pesant que l'écrasante fraîcheur de mon écho, comme une assiette éclatante.
Libre pensée porteuse en fragile faïence.
La nappe m'offre son coin de fruits répandus.
J'ouvre les doigts comme une dentelle.
Le frôlement des galops m'effeuille.
Profondeur attouchée, si blanche.»

Les Aurores fulminantes
. Suzanne Meloche. Herbes rouges (1980)
«Tu reconnais presque toutes les familles autour de toi. Toutes sont élégantes. Plus qu'à l'habitude. Pas pour cacher la faim. Non, simplement pour l'accueillir avec dignité. Pour bien lui faire savoir qu'on n' pas peur d'elle.
Le son des corps avides, se nourrissant enfin, trahit pourtant le précarité du moment. Sous les tissus immaculés, tout le monde tient sur un fil.»

La Femme qui fuit. Anaïs Barbeau-Lavalette. Éditions Marchand de feuilles (2015)
«Bède raconte qu'un homme avait commis tant de péchés que son évêque hésitait à l'absoudre. Enfin l'évêque envoya cet homme au tombeau de Saint-Jacques avec un papier où étaient inscrits ses péchés. Le jour de la Saint-Jacques, le papier fut placé sur le tombeau du saint ; et quand le pêcheur, après une fervente prière, reprit le papier et l'ouvrit, il vit que la liste de ses péchés se trouvait effacée.»

La Légende dorée : Saint-Jacques Majeur. Jacques de Voragine. Éditions du Seuil (1998)
«- Vraiment, dit-il, je pleure ? Hé bien, ne regardez pas, ce sont des larmes de honte. Depuis cinq minutes, figurez-vous, je cherche en vain un moment, un seul moment de ma vie à vous offrir, qui soit digne de vous. Je ne me rappelle que des niaiseries ou des saletés. Toute la vie d'un homme ne ferait pas seulement de quoi remplir le creux de la main.»

La Joie. Georges Bernanos. Plon (1929)
«Car il y a aussi deux modes hallucinatoires. La mauvaise hallucination est celle des envoûtements et des fausses visions ; c'est le symptôme de la folie qu'on enferme, le stigmate du jugement psychiatrique. Artaud n'a cessé de s'en défendre. Il proteste de sa lucidité.!il affirme que l'opium ne produit pas d'effets de ce type. L'autre hallucination, innommée, active dans l'écriture, dans le choix des vocables, dans la direction du trait, abolit la distinction entre intérieur et extérieur. C'est l'image intérieure concrétisée, c'est-à-dire projetée dans le monde de la perception ; ou, selon un mouvement inverse, la froide apparence, la lettre morte des apparences, rendue au foyer(plus ou moins actif) de la vision.»

Antonin Artaud. Sous la direction de Guillaume Fau. Bibliothèque nationale de France / Gallimard (2006)
 «Et j'entraînai [Fernand] Léger sur la sente qui contourne le cimetière de Gentilly, en direction de la poterne des Peupliers.»

L'Homme foudroyé. Blaise Cendrars. Éditions Denoël (1945)

121 Ne point faire une affaire de ce qui n'en est pas une

«Comme il y a des gens qui ne s'embarrassent de rien, d'autres s'embarrassent de tout, ils parlent toujours en ministres d'État. Ils prennent tout au pied  de la lettre ou au mystérieux. Des choses qui donnent du chagrin, il y en a peu dont il faille faire cas ; autrement  on se tourmente bien en vain. C'est à faire contresens que de prendre à cœur ce qu'il faut jeter derrière le dos. Beaucoup de choses, qui étaient de quelque conséquence, n'ont rien été, parce que l'on ne s'en est pas mis en peine ; et d'autres, qui n'étaient rien, sont devenues choses d'importance, pour en avoir fait grand cas. Du commencement, il est aisé de venir à bout de tout ; après cela non. Très souvent le mal vient du remède même. Ce n'est donc pas la pire règle de vie que de laisser aller les choses.»
 
L'art de la prudence. Balthasar Graciàn. Rivages poche, petite bibliothèque (1994)
«Jamais il n'a senti, après l'union des corps, cette tristesse dont parle la maxime, mais toujours cette fine allégresse, cette clarté intérieure pétillante comme du champagne, cette paix où l'âme et le corps forment un seul cristal translucide. Est-ce seulement parce que l'accomplissement charnel dissipe les nuages que fait monter le désir, brise les verres opaques que celui-ci construit autour de son objet ? S'il en était ainsi, la satisfaction purement physique du désir entraînerait sans doute une sorte d'indifférence, de désintérêt, à l'égard de l'être qui a procuré cette satisfaction, une impression de satiété ou de réplétion semblable à celle du marcheur altéré qui vient de vider à longs traits une gourde d'eau glacée. Peut-être est-ce un pareil sentiment de possession et de perte, d'assouvissement et de dépit, cette conscience de ne pouvoir aller plus loin dans la jouissance et de voir s'évanouir en même temps la soif qui rendait possible cette jouissance que le moraliste a appelé la tristesse de l'animal après l'union charnelle. Le marcheur couvert de sueur et de poussière contemple tristement, en effet la cascade où il vient de s'abreuver et dont les eaux transparentes bondissant dans l'ombre par-dessus les cailloux ne lui sont plus d'aucun secours ; ayant dépassé sa soif, il se retrouve seul avec soi : ayant détruit ce qui le projetait vers le bonheur, il découvre que le monde ne nous apporte rien de plus que l'anéantissement de ce qui nous détournait de nous-mêmes.
Certitude paisible, communication sans un mot, plénitude, sentiment de présence double et indivisible au cœur même de la vie, déploiement autour de soi des immenses horizons du monde, éveil, disponibilité, tels sont au contraire les caractères de cet instant. En l'homme l'animal est sauvé de l'homme.»
 
Les Reins et les coeurs. Paul-André Lesort. Éditions du Seuil (1964)
«Jusqu'ici et depuis la plus haute antiquité, la lecture et l'écriture étaient les seuls mode d'échange comme les seuls procédés de travail et de conservation de l'expression par le langage. On ne peut plus répondre de leur avenir. Quant aux esprits, on voit déjà qu'ils sont sollicités et séduits par tant de prestiges immédiats, tant d'excitants divers qui leur donnent sans effort les sensations les plus intenses, et leur représentent la vie même et la nature toute présente, que l'on peut douter si nos petits-fils trouveront la moindre saveur aux grâces surannées de nos poètes les plus extraordinaires, et de toute poésie en général.»
 
Variété III, IV et V. Paul Valéry. Gallimard (1936-1944)
«Si tu veux mon avis […] on n'a pas besoin de peindre des arbres alors qu'on en voit de mieux fait sur le chemin des galeries. Je peins, oui, mais seulement des conceptions, ou, si tu veux, des synthèses, des accords, et ainsi de suite.»

Frantisek Kupka. Lettre à Machar, 25 juin in Kupka, pionnier de l'abstraction, RMN (2018)
«L'homme est un être qui peut "faire", et "faire" signifie : agir consciemment et de sa propre initiative.
[...]
Dans sa vie personnelle, familiale et sociale, en politique, en sciences, en art, en philosophie, en religion, bref, en tout ce qui constitue le processus de vie ordinaire de l'homme contemporain, tout, du commencement jusqu'à la fin, se fait de soi-même, et il n'est pas une seule de ces « victimes de la civilisation contemporaine » qui puisse « faire » quoi que ce soit.»
 
Récits de Belzébuth à son petit-fils : critique objectivement impartiale de la vie des hommes. Georges Ivanovitch Gurdjieff. Stock + plus (1976)
« L'harmonie est la présence de l'éternité [...] »

Antimémoires. André Malraux. Gallimard (1972)
«Parler en face, des grands monstres poses de Renoir... De plus en plus important pour moi. Rien à voir avec la photo-là... Chair étoupe baudruches à caresser. Délectables géantes.»

Ultima necat I : journal intime 1978-1985. Philippe Muray. Les Belles Lettres (2015)
«Ceux-là sont nés de la morale que t'ont enseignée les marchands, lesquels veulent placer leurs marchandises. Tu crois que ta joie vient de recevoir et d'acheter, comment te souviendrais-tu du contraire quand on a fait tellement d'efforts pour te créer des liens avec l'objet ?»

Citadelle. Antoine de Saint-Éxupery. Gallimard (1959)

mardi 20 novembre 2018

«Alors, en général, on a le choix entre être une fille et être une héroïne – le genre d’héroïnes qu’on trouve dans les romans. Mais je ne suis pas une héroïne non plus ! Une héroïne est belle – ses yeux aussi bleus que la mer lancent des regards mystérieux par-dessous ses paupières baissées –, elle avance en ondulant, son sourire éclatant ensorcelle, elle tombe systématiquement amoureuse d’un homme – un homme, obligatoirement –, elle mange des choses (que les romans appellent toujours “des mets délicats”) avec un appétit d’oiseau, et dans les grandes occasions, sa voix se remplit de larmes. Moi, je ne me livre à aucune de ces activités. Je ne suis pas belle. Ma démarche n’est pas ondulante – d’ailleurs je n’ai jamais vu personne onduler, à part peut-être une vache suralimentée. Mon sourire éclatant n’ensorcelle personne. Mes yeux, qui n’ont rien de commun avec la mer, ne lancent aucun regard mystérieux. Je n’ai jamais mangé de “mets délicats” et j’ai un excellent coup de fourchette. Et pour finir, ma voix, à ma connaissance, ne s’est pas encore remplie de larmes.
Non, je ne suis pas une héroïne.»

Que le diable m'emporte. Mary MacLane. Sous-sol (2018)


 

Sur la photographie (1)

«Le désir de photographier est le contraire du désir de signifier à tout prix, de témoigner ou d’informer. Il est de l’ordre de la sidération et de l’illusion. De l’ordre de la disparition aussi, car si quelque chose veut devenir image, ce n’est pas pour durer, c’est pour mieux disparaître.» 

Sur la photographie. Jean Baudrillard. Librairie générale française (1999)

PBF 2018.35 P : Le diable, la maman et la putain

Mercredi 21 novembre 2018 à 19H sur Radio-Radio, hertzien Toulouse : 106.8 Mhz ou sur http://62.210.215.26:8000/xstream , nouvelle diffusion d'une émission de la Petite Boutique Fantasque, une émission autour d'extraits du film de Jean Eustache : La Maman et la putain.

Liste des morceaux diffusés :

1) Speak no evil (Wayne Shorter)
2) Du gris (Georgette Plana)
3) Comme à la radio (Brigitte Fontaine)
4) Frog galliard (John Dowland) par Thomas Dunford
5) Gnossienne 4 (Erik Satie) par Sébastien Llinares
6) Die interimsliebenden (Einstürzende Neubauten)
7) Sommeil (GAM)
8) Expectans expectavit Dominus (Igor Stravinsky) extrait de la Symphonie des psaumes par Orchestre symphonique tchèque dirigé par Karel Ancerl 

Tous les Toulousains reconnaîtront l'image de couverture. Les autres me demanderont...

Pour ceux qui auraient piscine indienne, ou toute autre obligation, il y aura possibilité de rattrapage avec les podcasts:
http://radioradiopodcast.net/…/LA_PETITE_BOUTI…/podcasts.php


Allons-y gaiement sans mollir !

mardi 13 novembre 2018

PBF 2018.34P : Bois ton café à l'eau de pluie place Pinel


Mercredi 14 novembre 2018 à 19H sur Radio-Radio, hertzien Toulouse : 106.8 Mhz ou sur http://62.210.215.26:8000/xstream , nouvelle émission de la Petite Boutique Fantasque, une émission pinelienne contenant la 15ème chronique de l'univers de Marius Pinel qui va nous entretenir de la pluie place Pinel.



Liste des morceaux diffusés :

1) Shapes and shadows (Lorenzo Naccarato trio)
2) Le Siècle des imbéciles (Rosalie Dubois)
3) [ ] (Rony Barrak)
4) Bois ton café, il va être froid (Rosette)
5) Nothing left but their names (Laurie Anderson)
6) A way with words (Robert Plant)
7) Memento mori (Wild women and the savages)



Il s'agit d'un émission un peu toulousaine avec Lorenzo Naccarato, les Wild women et la place Pinel... Un peu de nostalgie ?



Pour ceux qui auraient piscine indienne, ou toute autre obligation, il y aura possibilité de rattrapage avec les podcasts:

http://radioradiopodcast.net/…/LA_PETITE_BOUTI…/podcasts.php



Allons-y gaiement sans mollir !