dimanche 28 août 2016

Convergence maudite

 Ainsi parlait Zarathoustra  : un livre qui est pour tous et qui n'est pour personneFriedrich Nietzsche. Éditions Gallimard (1971)
Fuis dans ta solitude ! Des petits et des pitoyables trop proche tu vivais. Échappe à leur vengeance qui ne se voit ! Ils ne sont rien, contre toi, que vengeance ! 
Contre eux plus ne lève le bras ! Ils sont innombrables et n'est ton lot d'être chasse-mouches.
Innombrables sont ces petits et ces pitoyables ; et plus d'un fier édifice, sous la pluie et la mauvaise herbe, à son déclin déjà fut entraîné.
Harassé je te vois par des mouches venimeuses, écorché jusqu'au sang je te vois en maintes places ; et ton orgueil ne se veut même irriter.»

Ainsi parlait Zarathoustra  : un livre qui est pour tous et qui n'est pour personneFriedrich Nietzsche. Editions Gallimard (1971)

La surface des choses

«La fraîcheur du boulevard la surprit. Elle marchait et éprouvait un grand repos à se souvenir de son enfance. Des arbres et des plaines. Des choses simples. Un jour, beaucoup plus tard, cet enfant lui était venu et c'était quelque chose d'incompréhensible et en même temps de plus simple encore. Une évidence plus forte que les autres. Elle avait servi cet enfant à la surface des choses et parmi d'autres choses vivantes. Et les mots n'existaient pas pour décrire ce qu'elle avait tout de suite éprouvé. Elle s'était sentie... mais oui, c'est cela intelligente. Et sûre d'elle-même et liée à tout et faisant partie d'un grand concert. Elle s'était fait porter le soir près de sa fenêtre. Les arbres vivaient, montaient, tiraient un printemps du sol : elle était leur égale. Et son enfant près d'elle respirait faiblement et c'était le moteur du monde et sa faible respiration animait le monde.»

Courrier Sud. Antoine de Saint-Exupéry. Éditions Gallimard (1959)

lundi 22 août 2016

Convergence érudite

 Ainsi parlait Zarathoustra  : un livre qui est pour tous et qui n'est pour personneFriedrich Nietzsche. Éditions Gallimard (1971)

dimanche 21 août 2016

Réminiscence personnelle (21)

«Il se sentait mal à l'aise, alourdi, mécontent comme lorsqu'on a reçu quelque fâcheuse nouvelle. Aucune pensée précise ne l'affligeait et il n'aurait su dire tout d'abord d'où lui venaient cette pesanteur de l'âme et cet engourdissement du corps. Il avait mal quelque part sans savoir où ; il portait en lui un petit point douloureux, un de ces presque insensibles meurtrissures dont on ne trouve pas la place, mais qui gênent, fatiguent, attristent, irritent, une souffrance inconnue et légère, quelque chose comme une graine de chagrin.»

Pierre et Jean. Guy de Maupassant. Éditions Belin / Gallimard (2011)

samedi 20 août 2016

«C'est là qu'est la différence décisive, conclut-il. Jadis, l'on ressentait les choses d'une manière en quelque sorte déductive, en partant de prémisses bien définies. Ce temps est passé. Aujourd'hui si l'on a plus d'idée directrice, on n'a pas davantage de méthode d'induction consciente et l'on essaie à l'aveuglette, comme des singes !»

L'Homme sans qualités. Robert Musil. Éditions du Seuil (1956)
«Ils s'installèrent dans un atelier de l'avenue du Maine, au n°14.
C'était, dans le quartier Montparnasse, une zone paisible et libre, peuplée de petite bourgeoisie, d'artisans et de phalanstères d'artistes.  [...]
L'atelier tout en vitrages, plein de lumière, n'était pas limité à sa propre surface. Il se reflétait pour ainsi dire indéfiniment dans d'autres ateliers, aussi vastes, aussi clairs, aussi vides. Des peintres, des sculpteurs, les habitaient. La jeunesse, la pauvreté, l'insouciance, la folie et l'espoir leur tenaient compagnie.»

Mermoz. Joseph Kessel. Éditions Gallimard (1938)
«Elle a voulu écouter hier, à la radio, une pianiste qu'elle connaît, une fille de quatorze ans, Vanessa Perez, se faufilant avec énergie dans les sonates de Haydn, une Californienne bien nette, elle aussi, venant du Vénézuela pour donner un concert à Padoue... Il y a des talents partout, à l'instant même on les filme, on les enregistre, et c'est comme si personne ne savait en parler : jamais on  n'aura vu autant de phénomènes et une aphasie si forte.»

La Fête à Venise. Philippe Sollers. Éditions Gallimard (1991)

jeudi 18 août 2016

Nature humaine

«Antoine Lemurier, qui avait manqué mourir, sortit heureusement de maladie, reprit son service au bureau et, tant bien que mal, pansa ses plaies d'argent. Durant cette épreuve, les voisins s'étaient réjouis en pensant que le mari allait crever, le mobilier être vendu, la femme à la rue. Tous étaient d'ailleurs d'excellentes gens, des cœurs d'or, comme tout le monde, et n'en voulaient nullement au ménage Lemurier, mais voyant se jouer auprès d'eux une sombre tragédie avec rebonds, péripéties, beuglements de proprio, huissier et fièvre montante, ils vivaient anxieusement dans l'attente d'un dénouement qui fût digne de la pièce. On en voulut à Lemurier de n'être pas mort.»

Le Passe-Muraille : nouvelles. Marcel Aymé. Librairie Gallimard (1943)

mardi 16 août 2016

Convergence dupe

Ainsi parlait Zarathoustra  : un livre qui est pour tous et qui n'est pour personneFriedrich Nietzsche. Éditions Gallimard (1971)
«Pourquoi, frère, me raconter que mes affaires vont mal ? dit le propriétaire foncier à son intendant. Tu n'as rien d'autre à me conter ? Fais-moi plutôt oublier mes tristesses et que je sois heureux. 
Et l'argent qui aurait dû servir à sauver la maison se gaspille en vue de la seule consolation du maître. Ainsi l'esprit de l'homme dort au lieu de chercher à découvrir les grands moyens réparateurs. Puis vient le jour où toute la propriété est vendue aux enchères, tandis que le seigneur promène dans son monde son besoin d'oubli et tombe de bassesses en bassesses...»
Les Âmes mortes : poème. Gogol. Flammarion (1990)

lundi 15 août 2016

Convergence chorégraphique

Ainsi parlait Zarathoustra  : un livre qui est pour tous et qui n'est pour personneFriedrich Nietzsche. Éditions Gallimard (1971)

Eblouissement des prémisses (incipit 25)

«Les collines, sous l'avion, creusaient déjà leur sillage d'ombre dans l'or du soir. Les plaines devenaient lumineuses mais d'une inusable lumière : dans ce pays elles n'en finissent pas de rendre leur or, de même qu'après l'hiver elles n'en finissent pas de rendre leur neige.
Et le pilote de l'avion, Fabien, qui ramenait de l'extrême Sud, vers Buenos-Aires, le courrier de Patagonie, reconnaissait l'approche du soir aux mêmes signes que les eaux d'un port : à ce calme, à ces rides légères qu'à peine dessinaient de tranquilles nuages. Il entrait dans une rade immense et bienheureuse.»

Vol de nuit. Antoine de Saint-Exupéry. Éditions Gallimard (1959)

jeudi 11 août 2016

«Finalement, il devint si misanthrope, qu'il se retira à l'écart et s'en alla vivre d'herbes et de plantes sur les montagnes. Toutefois, ce régime l'ayant rendu hydropique, il redescendit à la ville pour consulter les médecins, auxquels il demanda sous forme d'énigme, s'ils pourraient changer un temps pluvieux en sècheresse. Comme ils ne comprenaient pas, il alla s'enfermer dans une étable, et espéra se guérir et dessécher cette eau à la chaleur de la bouses dont il se couvrit. Mais, n'arrivant à rien même par ce moyen, il finit par en mourir à l'âge de soixante ans.»

Vie, doctrines et sentences des philosophes illustres : Héraclite. Diogène Laërce. Garnier-Frères (1965)

mercredi 10 août 2016

Convergence lacanienne



Ainsi parlait Zarathoustra  : un livre qui est pour tous et qui n'est pour personneFriedrich Nietzsche. Éditions Gallimard (1971)

mardi 9 août 2016

«Mémoire, infatigable mémoire qui multiplie ses leurres avec un art retors, mémoire turbulente comme un enfant qui court de chambre en chambre et que la main ne peut retenir»

Ostinato. Louis-René des Forêts. Gallimard  Quarto (2015)

Gémination : disposition par paires


lundi 8 août 2016

Convergence darwinienne

Ainsi parlait Zarathoustra  : un livre qui est pour tous et qui n'est pour personneFriedrich Nietzsche. Éditions Gallimard (1971)

Charmes de la relecture (7)

«Un ciel pur comme de l'eau baignait les étoiles et les révélait. Puis c'était la nuit. Le Sahara se dépliait dune par dune sous la lune. Sur nos fronts cette lumière de lampe, qui ne livre pas les objets mais les compose, nourrit de matière tendre chaque chose. Sous nos pas assourdis, c'était le luxe d'un sable épais. Et nous marchions nu-tête, libérés du poids du soleil. La nuit cette demeure...»

Courrier Sud. Antoine de Saint-Exupéry. Éditions Gallimard (1959)

dimanche 7 août 2016

«La victimomanie est une variété de festivomanie que l'on peut d'ores et déjà, avant d'y revenir plus longuement, classer dans la catégorie du festif funèbre, ou festif de lamentation. Le victimomane ne peut comprendre l'existence de quelque chose que s'il parvient à se convaincre, généralement sans grandes difficultés, que cette chose a été outragée et qu'il convient d'y remédier. Le corollaire étant bien entendu que ce qui n'a jamais subi aucun affront n'existe simplement pas.»

Après l'Histoire. Philippe Muray. Les Belles Lettres (2000)

«Aujourd'hui, tout le monde est écrivain et plus personne ne lit, poursuivit-il. Vous êtes-vous demandé, mon général, combien de livres on imprime chaque année ? Je crois me souvenir que l'on compte plus de cent livres par jour, rien qu'en Allemagne ! Et l'on fonde chaque année plus de mille périodiques ! Chacun écrit ; chacun se sert des pensées, pour peu qu'elles lui agréent, comme si elles étaient siennes ; personne ne pense à prendre la responsabilité de l'ensemble ! Depuis que l’Église a perdu son influence, il n'y a plus d'autorité suprême dans le chaos où nous vivons. Il n'y a plus ni modèles, ni principes d'éducation. Dans ces conditions, il est tout naturel que les sentiments et la morale aillent à la dérive et que l'homme le plus stable commence à chanceler.»

L'Homme sans qualités. Robert Musil. Éditions du Seuil (1956)

Charmes de la relecture (6)

«Il y avait à Montmartre, au troisième étage du 75bis de la rue d'Orchampt, un excellent homme nommé Dutilleul qui possédait le don singulier de passer à travers les murs sans être incommodé. Il portait un binocle, une petite barbiche noire et il était employé de troisième classe au ministère de l'Enregistrement. En hiver, il se rendait à son bureau par l'autobus, et, à la belle saison, il faisait le trajet à pied sous son chapeau melon.»

Le Passe-muraille : nouvelles. Marcel Aymé. Librairie Gallimard (1943)

samedi 6 août 2016

Convergence confusionelle


Ainsi parlait Zarathoustra  : un livre qui est pour tous et qui n'est pour personneFriedrich Nietzsche. Editions Gallimard (1971)

mardi 2 août 2016

«Bon, et, enfin, nous avons comme invitée, vois-tu, une certaine Tatiana Ivanovna, elle aussi, je crois bien, c'est une parente lointaine à nous -tu ne la connais pas encore- mais...une demoiselle avec des côtés plaisants : elle est riche, mon bon, tellement, qu'elle pourrait acheter deux Stépantchikovo ; elle a hérité tout récemment, sinon, elle crevait de faim.»

Le Bourg de Stépantchikovo et sa populationFédor Dostoïevski. Babel Actes Sud (2001)

lundi 1 août 2016

Convergence démocratique

Ainsi parlait Zarathoustra  : un livre qui est pour tous et qui n'est pour personneFriedrich Nietzsche. Editions Gallimard (1971)
«Le désir est un souhait irraisonné à quoi sont subordonnées les affections suivantes : indigence, haine, rivalité, colère, amour, ressentiment et emportement. L'indigence est un désir qui vient de ce que nous n'avons pas ce que nous voulons, et que nous cherchons sans cesse à l'avoir ; la haine est le désir qu'il arrive du mal à autrui et que ce mal dure et croisse ; la rivalité est un désir provenant d'un choix à faire ; la colère est un désir de punir celui qui paraît nous avoir injustement fait du tort ; l'amour est un désir qui ne vient jamais aux philosophes, car c'est une tentative pour s'unir à quelqu’un à cause de sa beauté ; le ressentiment est une colère vieillie cherchant avec soin une vengeance, comme le montrent les vers suivants :
Si vraiment tout un jour il a contenu sa bile,
Il n'en aura pas moins ensuite du ressentiment, jusqu'à ce qu'elle éclate enfin
l'emportement, enfin, est une colère naissante.»

Vie, doctrines et sentences des philosophes illustres : Zénon. Diogène Laërce. Garnier-Frères (1965)

Quelques Éléments supplémentaires de la Société du Spectacle (2)

«La jeune fille n'est bonne qu'à consommer ; du loisir ou du travail, qu'importe.»

Premiers matériaux pour une théorie de la jeune fille. Tiqqun. Mille et une nuits (2001)