samedi 17 août 2019

Et pendant ce temps-là (8)


«J’ai perdu dix ans de ma vie intellectuelle à me laisser bercer par les ronrons de ces farceurs de poètes, qui sont, je le pense fermement, zéro pour la culture spirituelle et les progrès de l’esprit. Je m’en suis aperçu le jour que j’ai lu certains livres qui m’ont réveillé, qui ne m’ont rien appris certes (les livres n’apprennent rien), mais qui m’ont fait prendre conscience de moi-même.»

Lettre à André Billy du 21 janvier 1943, Correspondance générale 1878-1956. Paul Léautaud. Flammarion, 1972.
«Alors, en général, on a le choix entre être une fille et être une héroïne – le genre d’héroïnes qu’on trouve dans les romans. Mais je ne suis pas une héroïne non plus ! Une héroïne est belle – ses yeux aussi bleus que la mer lancent des regards mystérieux par-dessous ses paupières baissées –, elle avance en ondulant, son sourire éclatant ensorcelle, elle tombe systématiquement amoureuse d’un homme – un homme, obligatoirement –, elle mange des choses (que les romans appellent toujours “des mets délicats”) avec un appétit d’oiseau, et dans les grandes occasions, sa voix se remplit de larmes. Moi, je ne me livre à aucune de ces activités. Je ne suis pas belle. Ma démarche n’est pas ondulante – d’ailleurs je n’ai jamais vu personne onduler, à part peut-être une vache suralimentée. Mon sourire éclatant n’ensorcelle personne. Mes yeux, qui n’ont rien de commun avec la mer, ne lancent aucun regard mystérieux. Je n’ai jamais mangé de “mets délicats” et j’ai un excellent coup de fourchette. Et pour finir, ma voix, à ma connaissance, ne s’est pas encore remplie de larmes.
Non, je ne suis pas une héroïne.»

Que le diable m'emporte. Mary MacLane. Sous-sol (2018)

Tentative d'autoportrait (17)


jeudi 15 août 2019

Véritable périple flasque (pour un chien) : documentation 2

«C'est l'oblique pudeur qui s'exprime indirectement, secondairement, ironiquement dans les mystifications et les incognitos de Satie.»

La Musique et l'ineffable. Vladimir Jankélévitch. Éditions du Seuil (1983)
«Il y a équilibre entre la rotation d'un satellite autour d'une planète inconnue et le soupir de satisfaction amoureuse d'une jeune fille, entre l'holocauste des abattoirs et quelques notes de Mozart entre la migration des cigognes et une opération de mathématique pure, entre la fission de l'atome et l'extase de Saint-François d'Assise.»

Pierre Auguste Renoir mon père. Jean Renoir. Éditions Gallimard (1981)

mercredi 14 août 2019

PBF 2019.18T : DirectLive du 9 août 2019

Mercredi 14 août 2019 à 19H sur Radio-Radio, (en hertzien Toulouse : 106.8 Mhz ou sur https://www.radioradiotoulouse.net) nouveau DirectLive de la Petite Boutique Fantasque pour varier un peu l'émission qui semble être rediffusée depuis plusieurs mercredis.

Liste des morceaux diffusés

1) La Nuit je mens (Alain Bashung)
2) La Guidouille (Chanson +)
3) London's burning (The Clash)
4) Panic in Detroit (David Bowie)
5) Black dog (Led Zeppelin)
6) Happy man (Iggy Pop)
7) See the sky to rain (Neil Young)
8) Sweet Virginia (Rolling Stones)
9) Battle of Evermore (Led Zeppelin)
10) Le Jour va se lever (Téléphone)
11) Always crashing in the same car (David Bowie)
+ fantaisistes traductions automatiques de Panic in Detroit, Black dog et Batlle of Evermore

Nous retiendrons qu'un femme aux grosses cuisses n'a pas d'âme d'après Robert Plant...
Pour ceux qui auraient piscine indienne, ou toute autre obligation, il y a une possibilité de rattrapage avec tous les podcasts de la PBFhttp://radioradiopodcast.net/…/LA_PETITE_BOUTI…/podcasts.php

Allons-y gaiement et sans mollir

dimanche 4 août 2019

«Qu'est-ce donc après tout que la littérature ? la littérature seule, sans enthousiasme ? C'est la plus vile des courtisaneries et la plus déshonorantes des inventions qui abrutissent.. C'est l'acrobatie de la pensée sans l'excuse du gagne-pain, car on y crève de misère à tous les niveaux, si l'on n'y joute pas le très lucratif négoce du maquignonnage politique ou de scandale irréligieux et pornographique, et l'on sait que la littérature moderne fait à peine autre chose. Athée, fille d'athées, mère d'athées, trois fois sacrilège, soixante-dix-sept fois marquise de la luxure et de l'impiété, cette littérature est devenue quelque chose comme le vomissement des siècles sur le fumier définitif de la pensée et du langage.»

Propos d'un entrepreneur en démolitions. Léon Bloy. Robert Laffont (2017)

203 : Connaître les excellences de son siècle

«Elles ne sont pas en grand nombre, il n'y a qu'un Phénix dans le monde. En tout un siècle il se voit à peine un grand capitaine, un parfait orateur, un sage : et il faut plusieurs siècles pour trouver un excellent Roi. Les médiocrités sont ordinaires, soit pour le nombre, ou pour l'estime ; mais les excellences sont rares en tout, parce qu'elles demandent une perfection accomplie ; et que plus la catégorie est sublime, plus il est difficile d'en atteindre le plus haut degré. Plusieurs ont usurpé le nom de Grand à César et à Alexandre, mais en vain ; car sans faits la voix du peuple n'est qu'un peu d'air. Il y a peu de Sénèques, et la renommée n'a célébré qu'un seul Apelle.» 

L'art de la prudence. Balthasar Graciàn. Rivages poche, petite bibliothèque (1994)
« Mais fort loin de méconnaître l'importance de l'Esthétique raisonnée, je lui réserve au contraire un rôle positif et de la plus grande conséquence réelle. Une Esthétique émanée de la réflexion et d'une volonté suivie de compréhension des fins de l'art, portant sa prétention jusqu'à interdire certains moyens, ou à prescrire des conditions à la jouissance comme à la production des œuvres, peut rendre et à rendu, en fait, d'immenses services à tel artiste ou à telle famille d'artistes, à titre de participation, de formulaire d'un certain art (et non de tout art). Elle donne des lois sous lesquelles il est possible de ranger les nombreuses conventions et desquelles on peut dériver les décisions de détail qu'un ouvrage assemble et coordonne. De telles formules peuvent, d'ailleurs, avoir dans certains cas, vertu créatrice, suggérer bien des idées que l'on n'eût jamais eues sans elles.La restriction est inventive au moins autant de fois, que la surabondance des libertés peut l'être. Je n'irai pas jusqu'à dire avec Joseph de Maistre que tout ce qui gêne l'homme le fortifie. De Maistre ne songeait peut être pas qu'il est des chaussures trop étroites. Mais, s'agissant des arts, il répondrait assez bien, sans doute, que des chaussures trop étroites nous feraient inventer des danses toutes nouvelles.»

Variété III, IV et V. Paul Valéry. Gallimard (1936-1944)

Projet Poubelle (30) : dans la tonalité de la Princesse et le Godelureau

«Ce vocable innocent de "collégien" pique Antoine à l'endroit sensible. Collégien ! cela dit tout : l'âge pénible, les manches trop courtes, la moustache pas assez longue, le coeur qui gonfle pour un parfum, pour un murmure de jupe, les années d'attente mélancolique et fiévreuse...»

L'Ingénue libertine. Colette. Le Livre de poche (1966)