jeudi 27 avril 2023

Visionnage toulousain en salle (50 ter) à Utopia Tournefeuille avec Louloute

Irlande, 1981, Cáit, une jeune fille effacée et négligée par sa famille, est envoyée vivre auprès de parents éloignés pendant l’été. Mais dans cette maison en apparence sans secret, où elle trouve l’épanouissement et l’affection, Cáit découvre une vérité douloureuse.

Elle pourrait être morte dans cet amas d’herbes folles. En réalité, Cáit fuit une réalité familiale des plus austères. Certes, il n’y a pas de violence. Mais il n’y a pas d’amour non plus : les parents élèvent leurs enfants sans affectation véritable, dans une sorte d’indifférence affective, pendant que la petite crie au secours en manifestant chaque matin son énurésie. Jusqu’au jour où une lettre arrive au domicile familial, priant les parents de confier Cáit pour le mois d’été à un couple de cousins.

On dit que l’argent ne fait pas le bonheur mais il en faut quand même. Cáit en arrivant chez ces cousins réapprend à s’habiller, à se coiffer comme une jeune fille de son âge. Elle découvre la douceur d’un bain, la délicatesse d’un gâteau posé sur la table et la douceur d’une main le long de sa joue ou son bras. The Quiet Girl est un film d’une immense tendresse. Une fois que la jeune fille a pris ses marques dans la maison estivale, elle s’abandonne à la beauté des champs, les couleurs de la mer et l’air agréable des chemins pavés d’arbres. Le long-métrage raconte avec une très belle sobriété la mécanique de la carence affective, et comment, avec une myriade d’attentions et de jolis gestes, l’amour, la confiance en soi reprennent leur place. C’est un film sur l’enfance, une enfance qu’il faut choyer, protéger, et aimer pour ce qu’elle est : une fenêtre sur le monde de demain.

Colm Bairéad apporte à ce récit une dimension à la fois spirituelle et sensible. Le réalisateur accompagne les pas de cette petite fille vers une reconstruction personnelle, à l’aune d’un couple, apparemment solide, mais qui projette dans les yeux de cette gamine leurs propres tourments. Le cinéaste évite le drame, les excès. Tout se joue dans l’épure de la mise en scène, la délicatesse presque invisible des gestes du quotidien, et une mise en valeur merveilleuse de la nature irlandaise. Acclamé à juste titre au festival de Berlin en 2022, The Quiet Girl réinvente presque un genre cinématographique à l’heure où les spectateurs se délectent d’effets spéciaux en tout genre. Ici, le dépouillement est convoqué et chaque image ressemble à un tableau de peinture classique.

Sans aucun doute, The Quiet Girl est peut-être le film le plus simple, mais aussi le plus profond et le plus sincère de la programmation de ce printemps 2023. Le métrage se laisse regarder comme une œuvre picturale, avec le sentiment que le temps qui passe devant l’écran, constitue pour le spectateur un petit cadeau de calme et de bien-être.

Laurent Cambon Avoiràlire

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