«Les clients ne seraient plus exactement les mêmes. La couleur de leurs vêtements s'éclaircirait plutôt ; étoffes plus légères, flottantes, d'alpaga. Les jours et les nuits alterneraient nécessairement. Le soleil s'étalerait, se diffuserait en de longs cheveux dorés qui suivraient, à midi, les striures de la porte vitrée, se déplacerait selon une courbe changeante, recommencée d'un bout à l'autre de la rue, courbe dont l'apogée se situerait au-dessus d'une petite place, aperçue juste en face. La circonférence du disque lumineux diminuerait, quand il s'éloigne, et, au soir, plongerait dans les arbres. La nuit s'étendrait, toujours plus durable que le jour. Les arbres perdraient leurs feuilles, leurs bourgeons, et des branches noires de suie, tordues se découperaient dans le ciel. Le soleil se coucherait toujours plus loin, derrière le bassin de pierre, rougirait l'eau de la cascade. Saisons au cours renversé.»

Les Aventures d'une jeune fille. Jean-Edern Hallier. Editions du Seuil (1963)