mardi 30 juillet 2024

Réminiscence personnelle (75)

140

«J'ai toujours eu une répugnance presque physique à l'égard des choses dissimulées -intrigue, diplomatie, sociétés secrètes, occultisme. Ce sont surtout ces deux dernières choses qui m'ont mis mal l'aise -la prétention qu'ont certains hommes- grâce à leur entente avec les dieux ou les Maîtres ou les démiurges- de connaître eux-seuls, à l'exclusion de tous les autres que nous sommes- les grands secrets qui sont le fondement du monde

Je ne puis croire qu'il en soit ainsi. Je peux croire que certains jugent que si. Pourquoi ces gens-là ne seraient-ils pas tous fous ou tous abusés ? Parce qu'ils sont nombreux ? Mais il ya des hallucinations collectives.

[...]»

Livre(s) de l'inquiétude : Vicente Guedes, Baron de Teive, Bernardo SoaresFernando Pessoa. Christian Bourgeois éditeur (2018)

lundi 29 juillet 2024

Visionnage domestique (196)

 

 
Légère et court vêtue. Jean Laviron (1953)

PBF 2024.18 : Vente de visitations et d'âmes place Pinel ce mercredi


Mercredi 31 juillet 2024 à 19H, la Petite Boutique Fantasque retrouve Marius Pinel pour une 45ème chronique de l'univers place Pinel et Fernand Bernadi pour un extrait de son disque Saveurs fantômes. Il y aura vente de visitations et d'âmes place Pinel ce mercredi.

Programmation musicale :
1) Let me sleep beside you (David Bowie)
2) Marius (Imago)
3) Book of days (Meredith Monk)
4) Love is the only way (Rikki Llonga)
5) extrait de Phonopoetica (Katalin Ladik)
6) Vie et mort de Gina Pinard (Les cowboys fringants)
7) L'accordéoneu (Raoul de Godewarsvelde)
8) Le kiosque (Michèle Bernard)
9) Variation turquoise (Fernand Bernadi)

+ 45ème chronique de l'univers place Pinel, Vendre son âme place Pinel par Marius Pinel

Pour ceux qui auraient piscine indienne, ou toute autre obligation, il y a une possibilité de rattrapage avec les podcasts de la PBF : https://www.mixcloud.com/RadioRadioToulouse/vente-de-visitations-et-dâmes-place-pinel-ce-mercredi-la-petite-boutique-fantasque/
 
Photographie de Francis Miller

Visionnage domestique (195)

El cochecito. Marco Ferreri (1961)

dimanche 28 juillet 2024

«Il est assez hardi dans l'état actuel de la documentation, d'esquisser cette entreprise difficile : pénétrer la pensée, la culture, l'âme même des officiers de bailliage, de présidial et d'Élection. Dans ce dessein, les inventaires de bibliothèques et de tableaux (particulièrement détaillés à Amiens, ce qui va donner une couleur picarde à ce qui suit) peuvent rendre les plus grands services, à condition d'être maniés avec précaution et bon sens (notamment en considérant l'âge du défunt).»

Le siècle de Louis XIVPierre Goubert. Éditions de Fallois (1996)

samedi 27 juillet 2024

194

«Le peuple est bon garçon.
Le peuple n'est jamais humanitaire. Ce qu'il y a de plus fondamental chez l'homme du peuple, c'est l'attention étroitement portée à ses propres intérêts, et l'exclusion soigneuse, pratiquée autant que faire se peut, des intérêts d'autrui.
Quand le peuple perd ses traditions, cela veut dire que le lien social s'est brisé ; et quand le lien social se brise, il en résulte que c'est le lien social entre la minorité et
 le peuple qui se brise. Et quand le lien social entre la minorité et le peuple se brise, c'est la fin de l'art et de la véritable science, la cessation d'activité des principaux  agents de l'existence de la civilisation.

[...]»

Livre(s) de l'inquiétude : Vicente Guedes, Baron de Teive, Bernardo SoaresFernando Pessoa. Christian Bourgeois éditeur (2018)

mercredi 24 juillet 2024

«On peut être un imbécile et pratiquer tout de même l'imparfait du subjonctif, cela s'est vu. Mais la haine de l'imparfait du subjonctif ne peut exister que dans le cœur d'un imbécile.»

Quatre ans de captivité à Cochons-sur-Marne. Léon Bloy. Mercure de France (1905)

PBF 2024.17 : A quoi sert toute cette viande creuse ?



Mercredi 24 juillet 2024 à 19H, la Petite Boutique Fantasque retrouve la carrière d'Agathe, lecture d'un extrait de Francion de Charles Sorel. Où l'on voit que l'on peut vendre le pucelage de sa nièce plusieurs fois. 
 La phrase du jour est tirée du morceau Optimise mon âme de Fernand Bernadi : "On ne devient pas quelqu'un d'important en sifflant les pin ups au passage".

Programmation musicale :
1) Optimise ton âme (Fernand Bernadi)
2) S'abreuver (Dora / Caroline Champy)
3) Musette walz (John Zorn)
4) Allégresse des vainqueurs (François Couperin) Scott Ross
5) Les Bagatelles (François Couperin) Scott Ross
6) Le voyage (Raoul Dugay)
7) Veronika (Jean Pax Mefret)

+ lecture d'un nouvel extrait de Françion de Charles Sorel, sixième partie de la carrière d'Agathe par Pascale Rémi

Pour ceux qui auraient piscine indienne, ou toute autre obligation, il y a une possibilité de rattrapage avec les podcasts de la PBF : 
 
Sus aux Philistins !
 
Toile de Marcel Gromaire

mardi 23 juillet 2024

40

«[...]

Car les masses sont prêtes, au fond, à toute espèce d'esclavage, pourvu que le chef se prouve sans cesse supérieur et légitime son droit à commander de naissance par la noblesse de la forme.

[...]»

Le gai savoirNietzsche. Gallimard Idées (1950) 

dimanche 14 juillet 2024

98

«Après une nuit où l'on a peu dormi plus personne ne nous aime. Le sommeil en moins a emporté avec lui un je-ne-sais-quoi qui nous rendait humain. Il y a une irritation latente à notre égard, semble-t-il, jusque dans l'air inorganique qui nous entoure. Nous-mêmes, finalement cessons de nous soutenir, et c'est entre nous et nous qu'est blessée la diplomatie de cette bataille sourde.

J'ai aujourd'hui traîné les pieds et ma grosse fatigue par les rues. Mon âme est réduite à un écheveau en pelote, et ce que je suis, ce que j'ai été, c'est-à-dire moi, a oublié son nom Si j'ai un lendemain, je sais seulement que je n'ai pas dormi, et l'enchevêtrement de divers intermèdes installe de grands silences dans mon discours intérieur.

[...]»

Livre(s) de l'inquiétude : Vicente Guedes, Baron de Teive, Bernardo SoaresFernando Pessoa. Christian Bourgeois éditeur (2018)

Thématique printanière Bryan Ferry 9 (These foolish things)

Oh will you never let me be?
Oh will you never set me free?
The ties that bound us, are still around us
There's no escape that I can see
And still those little things remain
That bring me happiness or pain
A cigarette that bears a lipstick's traces
An airline ticket to romantic places
And still my heart has wings
These foolish things
Remind me of you
A tinkling piano in the next apartment
Those stumbling words that told you what my heart meant
A fairground's painted swings
These foolish things
Remind me of you
You came, you saw, you conquered me
When you did that to me, I somehow knew that this had to be
The winds of March that make my heart a dancer
A telephone that rings - but who's to answer?
Oh, how the ghost of you clings
These foolish things
Remind me of you
Gardenia perfume lingring on a pillow
Wild strawberries only seven francs a kilo
And still my heart has wings
These foolish things
Remind me of you
I know that this was bound to be
These things have haunted me
For you've entirely enchanted me
The sigh of midnight trains in empty stations
Silk stockings thrown aside, dance invitations
Oh, how the ghost of you clings
These foolish things
Remind me of you
The smile of Garbo and the scent of roses
The waiters whistling as the last bar closes
The song that Crosby sings
These foolish things
Remind me of you
How strange, how sweet, to find you still
These things are dear to me
That seem to bring you so near to me
The scent of smouldering leaves, the wail of steamers
Two lovers on the street who walk like dreamers
Oh, how the ghost of you clings
These foolish things
Remind me of you, just you.

Eric Maschwitz / JackStrachey

115

«Fluide, l'abandon du jour se meurt entre les pourpres épuisées. Personne ne me dira qui je suis, ni ne saura qui j'ai été. Je suis descendu de la montagne ignorée dans la vallée que j'allais ignorer, et mes pas, dans cette lente fin d'après midi, sont des vestiges laissés les clairières de la forêt. Tous ceux que j'ai aimés m'ont oublié dans l'ombre.

[...]»

Livre(s) de l'inquiétude : Vicente Guedes, Baron de Teive, Bernardo SoaresFernando Pessoa. Christian Bourgeois éditeur (2018)

Visionnage domestique (194)

Sonate d'automne. Ingmar Bergman (1978)

samedi 13 juillet 2024

116

«[...]

Plus je médite sur la capacité, que nous avons, de nous tromper, plus je sens que s'échappe de mes doigts las le sable invisible des certitudes évanouies.

[...]»

Livre(s) de l'inquiétude : Vicente Guedes, Baron de Teive, Bernardo SoaresFernando Pessoa. Christian Bourgeois éditeur (2018)

Thématique printanière Bryan Ferry 8

I asked your mother for you
She told me that you was too young
I wish to the Lord I'd never seen your face
Or heard your lying tongue

Irene goodnight, Irene goodnight
Goodnight Irene, Goodnight Irene
I'll see you in my dreams

Sometimes I live in the country
Sometimes I live in the town
Sometimes I have a great notion
To jump into the river and drown

Irene goodnight, Irene goodnight
Goodnight Irene, Goodnight Irene
I'll see you in my dreams

I love Irene God knows I do
Love her till the sea run dry
And if Irene turns her back on me
I'm gonna take morphine and die

Irene goodnight, Irene goodnight
Goodnight Irene, Goodnight Irene
I'll see you in my dreams
Goodnight Irene, Goodnight Irene
I'll see you in my dreams


Huddie Ledbetter, Alan Lomax, John Sr. Lomax

Réminiscence personnelle (74)

110

«La banalité est un foyer. Le quotidien est maternel. Après une large incursion dans la grande poésie, sur les montagnes de l'aspiration sublime, les rochers du transcendant et de l'occulte, on trouve plus que délicieux et revigorant de rentrer à l'auberge où les imbéciles heureux rient aux éclats, de boire avec eux, devenu idiot pareillement, tel que Dieu nous a faits, content de l'univers qui nous a été donné, et laissant le reste à ceux qui gravissent des montagnes pour ne rien faire une fois là-haut.

[...]»

Livre(s) de l'inquiétude : Vicente Guedes, Baron de Teive, Bernardo SoaresFernando Pessoa. Christian Bourgeois éditeur (2018)

mercredi 10 juillet 2024

PBF 2024.16 : S'il la poussait sur 8000 cela ne m'étonnerait pas

 
Mercredi 10 juillet 2024 à 19H, la Petite Boutique après les terribles souvenirs équestres de Denis Podalydès nous restons dans le monde du cheval mais dans l’univers des courses hippiques et des petits escrocs qui gravitent autour, à partir du film Courte tête de Norbert Carbonnaux sorti en 1956. La Petite Boutique Fantasque le seule émission à la cuisse magnétique.

Programmation musicale :
1) Ca va ça vient (Pierre Barouh)
2) Alphaville (Bryan Ferry) Bryan Ferry jazz orchestra
3) Prélude 1 : The middle pillar (Zorn)
4) Rhiannon (Fleetwood Mac)
5) Far post (Robert Plant)
6) French cancan (Jacques Offenbach) Jules et son limonaire
7) Crazy man Michael (Fairport convention)
8) Danser dans les orties (Fernand Bernadi)

+ cinq extraits de Courte-tête (Norbert Carbonnaux)

Pour ceux qui auraient piscine indienne, ou toute autre obligation, il y a une possibilité de rattrapage avec les podcasts de la PBF :
https://www.mixcloud.com/RadioRadioToulouse/sil-la-poussait-sur-8000-cela-ne-métonnerait-pas-la-petite-boutique-fantasque/
Sus aux Philistins !

Photographie : Jack Delano

dimanche 7 juillet 2024

Dictionnaire additif (7) pour poème-continuum


 

Thématique printanière Bryan Ferry 7

Tell me something I must know
The burning question why
Half a man is twice as much
When he's on the line
Happiness - hard to get
Valentine in hand
None of them will ever guess
But you understand
How many men in a world of their own
There is no end to the great unknown
Tell me something I must know
I'm outside looking in
Train of mirrors none so fair
Let the show begin
How many men in a world of their own
There is no end to the great unknown

Valentine. Bryan Ferry

85

«Toute la journée, dans toute la désolation de ses nuages légers et tièdes, a été occupée par les informations annonçant une révolution. Ces nouvelles, vraies ou fausses, m'emplissent toujours d'un malaise particulier, mélange de dédain et de nausée physique. Cela fait souffrir mon intelligence que des gens pensent changer quoi que ce soit en s'agitant. La violence, quelle qu'elle soit, a toujours été pour moi une forme exorbitée de la stupidité humaine. Par ailleurs, tous les révolutionnaires sont stupides, comme le sont, à un degré moindre, parce que moins gênant, tous les réformateurs.

Révolutionnaire ou réformateur -l'erreur est la même. Impuissant à dominer et réformer sa propre attitude à l'égard de la vie, qui est tout, ou son être, qui est presque tout, l'homme se dérobe en cherchant à modifier les autres et le monde extérieur. Tout révolutionnaire, tout réformateur est un évadé. Combattre c'est ne pas être capable de se combattre soi-même. Réformer c'est ne pas avoir amélioration possible.»

Livre(s) de l'inquiétude : Vicente Guedes, Baron de Teive, Bernardo SoaresFernando Pessoa. Christian Bourgeois éditeur (2018)

samedi 6 juillet 2024

Complainte amoureuse

Oui, dès l’instant que je vous vis, 
Beauté féroce, vous me plûtes ; 
De l’amour qu’en vos yeux je pris, 
Sur-le-champ vous vous aperçûtes ; 
Mais de quel air froid vous reçûtes 
Tous les soins que pour vous je pris ! 
Combien de soupirs je rendis !
De quelle cruauté vous fûtes !
Et quel profond dédain vous eûtes
Pour les vœux que je vous offris !
En vain je priai, je gémis : 
Dans votre dureté vous sûtes 
Mépriser tout ce que je fis. 
Même un jour je vous écrivis 
Un billet tendre que vous lûtes, 
Et je ne sais comment vous pûtes 
De sang-froid voir ce que j’y mis. 
Ah ! fallait-il que je vous visse, 
Fallait-il que vous me plussiez, 
Qu’ingénument je vous le disse, 
Qu’avec orgueil vous vous tussiez ! 
Fallait-il que je vous aimasse, 
Que vous me désespérassiez, 
Et qu’en vain je m’opiniâtrasse, 
Et que je vous idolâtrasse 
Pour que vous m’assassinassiez !

Alphonse Allais

Et pendant ce temps inversé-là (20)


 

90

«[...] 

Un homme, même si je peux le reconnaître en pensée que c'est un être vivant comme moi, a toujours eu, pour ce qui est en moi, involontairement, est véritablement moi, moins d'importance qu'un arbre si l'arbre est plus beau. C'est pourquoi j'ai toujours considéré les mouvements humains -les grandes tragédies collectives de l'histoire ou de ce qu'on fait d'elle- comme des frises de vives couleurs, vides de l'âme de ceux qui les parcourent. Jamais ne m'a pesé ce qui avait pu arriver de tragique en Chine. C'est un décor lointain, même à sang et à peste.

Je me rappelle, avec une tristesse ironique, une manifestation d'ouvriers, sous l'égide de je ne sais quelle sincérité (j'ai toujours du mal à admettre la sincérité dans les mouvements collectifs, dans la mesure où l'individu, seul avec lui-même, est l'unique être qui sent). C'était un groupe compact et désordonné de crétins animés, qui avait défilé en criant des choses diverses face à mon indifférence hors-jeu. J'ai subitement eu la nausée. Ils n'étaient même pas suffisamment sales. Ceux qui souffrent vraiment ne font pas dans la plèbe, ne s'organisant pas en groupe. Quand on souffre on souffre seul

Livre(s) de l'inquiétude : Vicente Guedes, Baron de Teive, Bernardo SoaresFernando Pessoa. Christian Bourgeois éditeur (2018)

«Dans le charme qu'avait Albertine à Paris, au coin de mon feu, vivait encore le désir que m'avait inspiré le cortège insolent et fleuri qui se déroulait le long de la plage et, comme Rachel gardait pour Saint-Loup, même quand il le lui eut fait quitter, le prestige de la vie de théâtre, en cette Albertine cloîtrée dans ma maison, loin de Balbec, d'où je l'avais précipitamment emmenée, subsistaient l'émoi, le désarroi social, la vanité inquiète, les désirs errants de la vie de bains de mer. 
Elle était si bien encagée que certains soirs même, je ne faisais pas demander qu'elle quittât sa chambre pour la mienne, elle que jadis tout le monde suivait, que j'avais tant de peine à rattraper filant sur sa bicyclette et que le liftier même ne pouvait pas me ramener, ne me laissant guère d'espoir qu'elle vînt, et que j'attendais pourtant toute la nuit.»

La prisonnière. Marcel Proust. GF Flammarion (1987)

92

«[...] 

Mon désir est de fuir ce que connais, fuir ce qui est mien, fuir ce que j'aime. Je désire partir - non pour des Indes impossibles, ou les grandes îles du Sud de tout, mais pour l'endroit, n'importe lequel -hameau ou désert- qui ne soit intrinsèquement pas celui-ci.»

Livre(s) de l'inquiétude : Vicente Guedes, Baron de Teive, Bernardo SoaresFernando Pessoa. Christian Bourgeois éditeur (2018)

Quelques Éléments supplémentaires de la Société du Spectacle (72)

«Quand la Jeune-Fille s'abandonne à son insignifiance, elle en tire encore gloire, c'est qu'elle s'amuse

Premiers matériaux pour la théorie de la jeune-FilleTiqqun. Mille et une nuit. (2001)