«- Mais il faut aussi accorder beaucoup d'importance à la vérité. Car si nous avons eu raison de parler comme nous l'avons fait tout à l'heure, et si réellement le mensonge n'est d'aucune utilité pour les dieux et qu'il est par contre utile aux hommes à la manière d'une espèce de drogue, il est évident que le recours à cette drogue doit être confié aux médecins, et que les profanes ne doivent pas y toucher.
- C'est évident, dit-il.
- C'est donc à ceux qui gouvernent la cité, si vraiment on doit l'accorder à certains, que revient la possibilité de mentir, que ce soit à l'égard des ennemis, ou à l'égard des citoyens quand il s'agit de l'intérêt de la cité. Pour tous les autres, il est hors de question qu'ils y recourent. Si, par ailleurs, il arrive qu'un individu particulier mente à nos gouvernants, nous dirons qu'il commet une faute grave, plus grave encore que celle qui consiste à mentir à son médecin quand on est malade, ou à cacher au pédotribe les choses qui concernent sa condition physique quand on fait de l'exercice, ou encore à ne pas communiquer au pilote l'état réel du navire et de l'équipage en lui mentant sur sa propre situation ou sur l'activité des membres de l'équipage.
- C'est très juste, dit-il.
- Par conséquent, si on prend quelqu'un à mentir dans la cité, provenant du groupe des artisans, soit devin, soit guérisseur de maladies, équarisseur de poutres, on le châtiera, en alléguant qu'il a entrepris de renverser et de mettre en péril la cité, comme s'il s'agissait d'un navire.»
La République. Platon. Flammarion (2002)
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