«Les petits vieux étaient assis sur un banc devant la cimenterie, ils s'invectivaient, s'empoignaient par le revers de la veste et se hurlaient aux oreilles.
De la poussière de ciment tombait en bruine sur le paysage, tous les jardins et les maisons étaient recouverts d'une fine pellicule de chaux.
Et je suis parti me promener dans les champs poussiéreux. Sous un poirier esseulé, un bonhomme tout riquiqui coupait de l'herbe à la faucille.
"Dites-moi, qu'est-ce que c'est que ces pépés braillard, là-bas, à la loge du gardien ?
- Ah, à la loge principale ? C'est nos retraités", dit le bonhomme tout riquiqui en continuant à couper son herbe.
Je fais : "Ils en ont, une belle vieillesse !
- Oui, hein, dit le bonhomme, je me fais déjà toute une fête à l'idée que d'ici quelques années, moi aussi, je serai assis là-bas.
- Savoir si vous arriverez à la retraite !
- Oh pour ça, c'est sûr ! Ici la région est excessivement saine. La longévité, c'est soixante-dix ans", dit le petit homme en fauchant d'une main alerte son herbe, qui dégage de la poussière de ciment comme un feu de bois humide sa fumée.»
Les Palabreurs. Bohumil Hrabal. Editions Albin Michel (1991)
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