«Ada n'était pas une fillette qu'on effarouchait aisément et sa délicatesse n'avait rien d'excessif : "Je raffole de tout ce qui rampe." Van n'avait jamais eu l'occasion de remarquer chez elle le plus petit sursaut de révolte virginale. Pourtant il lui suffisait de se remémorer deux ou trois rêves horribles pour imaginer l'offensée -dans la vie réelle, ou du moins dans la vie des comptes à rendre- reculant, l'oeil hagard, reléguant l'agresseur dans le désert de son désir pour aller tout dire à son institutrice ou à sa mère -ou encore à un gigantesque laquais (introuvable dans le logis, mais non pas incroyable en rêve : bien au contraire, perforable à souhait, comme une outre de sang qu'on crève d'un coup de ceste clouté); l'incident était nécessairement suivi d'une mesure d'expulsion définitive...»
Ada ou l'ardeur. Vladimir Nabokov. Librairie Arthème Fayard (1975)
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