«Quelle manière, pour éveiller l'appétit envers leur leçon, à ces tendres âmes, et craintives de les y guider d'une trogne effroyable, les mains armées de fouets ? Inique et pernicieuse forme. Joint ce que Quintilian en a très bien remarqué, que cette impérieuse autorité, tire des suites périlleuses : et nommément à notre façon de châtiment. Combien leurs classes seraient plus décemment jonchées de fleurs et de feuillées que de tronçons d'osiers sanglants ? J'y ferai portraire la joie, l'allégresse, et Flora, et les Grâces : comme fit en son école le philosophe Speusippus. Où est le profit, que là fût aussi leur ébat. On doit ensucrer les viandes salubres à l'enfant : et enfieller celles qui lui sont nuisibles. C'est merveille combien Platon se montre soigneux en ses lois, de la gaieté et passetemps de la jeunesse en sa cité : et combien il s'arrête à leurs courses, jeux, chansons, sauts et danses : desquelles il dit, que l'antiquité a donné la conduite et le patronage aux Dieux mêmes, Apollon, aux Muses et Minerve. Pour les sciences lettrées, il s'y amuse fort peu : et semble ne recommander particulièrement la poésie, que pour la musique.»
Les Essais : De l'institution des enfants. Montaigne. Librairie Générale Française (2002)
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