dimanche 31 août 2025

Souvenir Saint-Honoré (janvier 71)

« Jeannette S[imon]

Un dimanche après-midi, je l'ai complètement déshabillée (avec d'ailleurs, je suppose, beaucoup de maladresse : comment dégrafer un soutien-gorge d'une seule main ; c'est depuis quelques mois que j'y parviens ; et d'ailleurs la mode ou mon choix -ou la fatalité ?- me portent vers des femmes qui ne portent pas de soutien-gorge ; et d'ailleurs on peut se demander pourquoi J[eannette] en portait-elle un !) : elle avait vraiment un corps de petite fille, la poitrine à peine marquée par des renflements, des longues jambes fuselées, un ventre à peine bombé, la taille à peine marquée, la strie nette du sexe sous une touffe de poils à peine bruns.
Je pense que c'était l'une des premières fois qu'elle était nue devant un homme et c'était certainement la première fois que la nudité d'une femme était aussi affirmée, aussi divine, contrastant tellement avec la nudité glauque des autres (rencontres furtives et inutiles, dans le noir, sous les draps).
Mais j'avais honte de ma nudité et d'ailleurs j'étais incapable d'aimer
J[eannette]. Elle voulait rester vierge, elle voulait que je la force (et elle s'est angoissée de plus en plus que je ne le fasse pas) mais je n'ai pas essayé ; je la caressais (très superficiellement, je ne pense pas l'avoir fait jouir une seule fois) et je me laissais caresser.
Les éléments du système étaient en place : elle avait besoin de moi, elle s'offrait à moi et je la repoussais. Elle ne me fascinait pas ; elle ne cherchait pas à m'échapper. »

Lieux. Georges Perec (2022)

mercredi 27 août 2025

Réminiscence personnelle (85)

« Je ne veux pas oublier. Peut-être est-ce le noyau de tout le livre : garder intact, répéter chaque année les mêmes souvenirs, évoquer les mêmes visages, les mêmes minuscules événements, rassembler tout dans une mémoire souveraine démentielle. »

Lieux. Georges Perec (2022)

dimanche 24 août 2025

«Et la Fenice devient le théâtre d'une étrange orgie de travestis. Comme la vérité dénudée du théâtre, du carnaval. Les entrevoir, seins trop blancs, gonflés d'hormones, frémissements, paupières ornées de khôl ou pailletées, plumes enroulées. Leurs gestes frileux. Ou ce rien étrangement mouvant, bruyant,  peureux. Poissons aux nageoires fluorescentes, odeur entêtante du kif, les bagues d’améthystes scintillaient doucement dans le noir. Poupée pop. Buée de santal. Celui qui geignait comme une accouchée, tout s'évaporait en rosée, corpuscules, vers luisants. Les courroies, les colliers de cuir à même la peau. Volute.

L'Italie. Guy Scarpetta. Grasset  (1983)

vendredi 22 août 2025

Visionnage domestique toulousain (257)

 

 
Toute une nuit. Chantal Akerman (1982)
 

“Toute une nuit”, l’autre chef-d’œuvre de Chantal Akerman

Un film de Chantal Akerman, totalement unique, à la fois coup théorique visionnaire et démonstration de mise en scène des corps. “Toute une nuit” réussit l’exploit de bouleverser en ne maniant que des silhouettes.
C’est la nuit, l’orage gronde sur Bruxelles. Des hommes, des femmes, des enfants sont filmé·es le temps de quelques secondes, dans des moments de tristesse, de romance, d’ennui, de peur, d’attente – liste pratiquement infinie des sentiments fugitifs attrapés par ce recueil de mélodrames miniatures, qu’il déploie par centaines jusqu’au petit matin, sans jamais nous délivrer plus de matière narrative que ce qu’une posture, un regard, un geste, un mot parfois peuvent laisser deviner de ces ombres aussitôt disparues.
Faut-il forcément raconter des histoires, ou est-ce qu’au cinéma les seuls gestes peuvent suffire ? Toute une nuit de Chantal Akerman postule la seconde proposition, avec une radicalité, une certitude absolue du geste proprement akermaniennes. On sent la cinéaste procéder de sa propre vision avec la même fermeté, la même nécessité, le même entêtement qui avaient fait surgir Jeanne Dielman, autre film de voyante pareillement conçu selon un processus presque mécanique. Faire ce postulat c’est d’abord un exploit : que le film non seulement tienne, mais continue de frapper l’œil et l’esprit, ne cesse de se renouveler à l’intérieur de son système, a quelque chose de sidérant. Cela tient notamment à la sensibilité musicale et chorégraphique de Chantal Akerman, dont on sait la passion pour Pina Bausch, ici flagrante.
Changer les paradigmes
C’est aussi, sur un plan plus théorique, une rupture moderne comme il y en a assez peu dans l’histoire du cinéma, de nature à en faire sans doute le film le plus avant-gardiste de sa réalisatrice, à tel point que personne n’a d’ailleurs tenté depuis de reproduire l’expérience – quarante ans après nous traînons encore loin derrière Toute une nuit.
Car si la narration par fragments, même très étrangers les uns aux autres, ou très furtifs, n’est évidemment pas une invention de Chantal Akerman, la réduction de la taille des morceaux jusqu’à la poudre en est une, et avec elle l’exonération de principes supposément inaltérables du cinéma, voire de la fiction tout court : les personnages, la narration, le début, la fin.
Toute une nuit, l’un des plus beaux films du monde
Plus de personnages, donc, ou alors des centaines, ce qui revient au même. Cette foule, c’est peut-être le peuple tout entier des fantômes de l’écran, l’amoncellement des figures de tous les films passés. Impression qui revient beaucoup devant Toute une nuit, qui avec sa manière de répertorier comme un inventaire exhaustif des motifs qui composent le langage gestuel du cinéma, catalogue d’étreintes, de pas, de soupirs, de hochements, de frissons, a quelque chose d’une nécrologie de son art, d’un geste de conclusion, qui pourrait paraître prétentieux, mais passe tout à fait tant qu’il a la politesse de demeurer encore aujourd’hui l’un des plus beaux films du monde. 
 
Théo Ribeton Inrocks 24 septembre 2024

«Toi : tu combles l'espace autour de toi et de ta présence, avec une force grandissante. La différence d'intensité entre l'imaginé et l'advenu devient un bonheur sensible.
Une masse de grâce, de parfum, d'harmonie m'enveloppe. Je pénètre comme un paysan dans l'élégance de ton corps. Délices de causer avec toi. En fait, je ne le puis qu'avec toi. Camarade, seul être au monde que j'aime. Avec qui je m'entende. Avec qui je me fonde, m'oublie, sans l'ombre d'hostilité entre nous.»

Journaux. Robert Musil. Seuil (1981)

mercredi 20 août 2025

Visionnage domestique toulousain (256)

La petite vadrouille. Bruno Podalydès (2024)

«Difficulté de se souvenir de la manière dont on a été habillé
Faire l'histoire de ses vêtements comme on peut raconter l'histoire de ses meubles, des lieux où on a vécu, des femmes que l'on a longtemps aimées, des livres dans lesquels on s'est plongé tout entier pendant des semaines ou des mois (Volcano, Temps perdu, Leiris, Kafka, Cent ans de solitude, il n'y pas tellement d'etc) et qui sont évidemment constitutifs de ce que l'on devient.
Qu'est-ce que tu deviens ?»

Lieux. Georges Perec (2022)

mardi 19 août 2025

PBF 2025.21 : Maxime en bedaine (première diffusion 27 août 2025)

 

Troisième chronique fringante d'outre-océan : maximes en bedaine

Poursuite de la comparaison (culturelle, linguistique,...) entre Québec et la France à travers l'analyse des paroles de chansons des Cowboys fringants.

Programmation musicale :
1) Le shack à Hector (Cowboys fringants)
2) La manifestation (
Cowboys fringants)

+ la seconde chronique fringante d’outre-océan en compagnie de Laurianne du Québec  sur le Shack à Hector et la Manifestation des Cowboys fringants

Pour ceux qui auraient piscine indienne, ou toute autre obligation, il y a une possibilité de rattrapage avec les podcasts de la PBF : https://www.mixcloud.com/RadioRadioToulouse/maximes-en-bedaine-la-petite-boutique-fantasque/

Sus aux Philistins !

photographie de Denys Arcand

Visionnage domestique toulousain (255)

 

 
Le viager. Pierre Tchernia et René Goscinny (1972)

dimanche 17 août 2025

Les belles définitions du père Patin (dans la série des maux contemporains)


 

Visionnage domestique toulousain (254)

 
200 motels. Franck Zappa et Tony Palmer (1971)

«Je la reverrai, évidemment. Peut-être ne m'importe-t-il plus qu'elle ne vienne à moi, qu'elle cède : j'ai été insensé de croire qu'elle rompre avec R. : elle ne peut évidemment pas rompre, puisqu'elle ne peut s'attacher, elle ne peut qu'attacher les autres à elle.
Douleur indolore, incolore et sans saveur.»

Lieux. Georges Perec (2022)

mercredi 13 août 2025

PBF 2025.20 : La lentille indiscrète (première diffusion 13 août 2025)

 

Poursuite de la découverte des nouvelles d'Armand Silvestre. Aujourd'hui, Conte oriental, que nous avons rebaptisé La lentille indiscrète par légère analogie avec le système des Bijoux indiscrets de Denis Diderot.

Programmation musicale :
1) Cette jolie photo d'elle (Marie-Annick Lépine)
2) Coup de foudre (Samarabalouf)
3)
Dyan (Rajan et Sajan Misra / Michael Nyman)
4) Peace of mind (Shakti)
5) Bitter sweet symphony (Vassileva Serafimova / Thomas Enhco)
6) Le monstre du Loch Ness (Silver d'argent)
7) Tonite (Rita Mitsuko)
8) Matte Kudasai (King Crimson)

+ la lecture de la nouvelle Conte oriental d'Armand Silvestre par Dominique Silvestre

Pour ceux qui auraient piscine indienne, ou toute autre obligation, il y a une possibilité de rattrapage avec les podcasts de la PBF : https://www.mixcloud.com/RadioRadioToulouse/la-lentille-indiscr%C3%A8te-la-petite-boutique-fantasque/

Sus aux Philistins !

mardi 12 août 2025

Visionnage domestique toulousain (253)

Le maître et Marguerite. Aleksandar Petrovic (1972)

«Les inhibitions de la séduction, chez les hommes d'expérience, tiennent à ce qu'ils ne sont pas sûrs, non de la femme, mais d'eux-mêmes. Serai-je à la hauteur des conséquences, si je presse maintenant le bouton ? Il fournit de l'âme, dégrafe, intérieurement, la femme, puis hésite. Il examine les yeux, la peau d'une femme pudique comme les seules réponses, muettes, capables de l'orienter. C'est comme la progression en forêt, le fusil à la main, avant le choc.»

Journaux. Robert Musil. Seuil (1981)

mercredi 6 août 2025

Visionnage domestique toulousain (252)


 
  
Le deuxième acte. Quentin Dupieux (2024)

«Le film repose sur un dispositif qui combine et recombine les composantes d’un casting étoilé : quatre acteurs jouant des acteurs (Léa Seydoux, Raphaël Quenard, Louis Garrel et Vincent Lindon) sont embarqués dans une comédie méta, réalisée par une intelligence artificielle et rythmée par de longues séquences exploitant les possibilités offertes par cette distribution. Ironie de Dupieux, qui fait ici la satire des I.A. : on pourrait quelque part réduire le scénario à une suite algorithmique – Quenard/Garrel ; Seydoux/Lindon ; réunion des quatre puis Seydoux/Quenard et Garrel/Lindon ; et enfin Lindon/Quenard et Seydoux/Garrel. Sauf que, comme l’annonçait la première scène, un petit caillou va dérégler (en partie) cette horlogerie trop parfaite : la présence d’un figurant, joué par un acteur moins connu (Manuel Guillot).
Cette mise en abyme permet à Dupieux de s’amuser avec ses comédiens, mais aussi de creuser son sujet préféré, à coups de longs travellings en plan-séquence : l’emboîtement du réel et de la fiction, la distorsion d’un univers sans qualités (ici, un restaurant perdu sur une route) qui devient l’estrade d’un théâtre de l’absurde. « La réalité, c’est la réalité ! » conclut le personnage de Florence (Seydoux), là encore de manière ironique : regarde-t-on des personnages ou des acteurs ? Où est le réel ? Le film brouille soigneusement les cartes, notamment par l’entremise du personnage de Guillaume, campé par un Vincent Lindon jouant un Vincent Lindon plus Vincent Lindon que Vincent Lindon – entre références à ses convictions politiques, ses tics ou encore sa « carrière américaine » avortée (le rôle refusé pour Inglourious Basterds de Tarantino). Dans le dénouement, alors que Guillaume finit sa journée de travail, il adopte pourtant un nouveau costume complètement à rebours de la persona lindonienne – jusqu’à se coller une fausse moustache, dans un écho probable à La Moustache d’Emmanuel Carrère. Autrement dit, tomber le masque implique d’en endosser un nouveau ; au sein de la triple mise en abyme (Lindon interprète un personnage, un acteur jouant dans un film dans un film, puis un acteur une fois le tournage terminé), c’est le « vrai » qui paraît le plus faux.
La réalité, justement
Que nous raconte Dupieux par cet embranchement d’astuces ? Que s’il mélange persona et rôles de composition pour noyer le poisson, la fiction, ça reste de la fiction, et que le réel, ça reste du réel ; il est peine perdue de vouloir discerner, dans les dialogues de l’un ou l’attitude de l’autre, la trace d’un acte tangible qui serait jugeable ou condamnable. C’est là que l’affaire se complique terriblement, dans la manière dont le film joue avec roublardise de la mise à bas du quatrième mur. Dès la première discussion entre Willy (Quenard) et David (Garrel), le premier se hasarde à des phrases de comptoir sur les « travelos », les handicapés ou les homosexuels, devant son partenaire de jeu qui, en jetant des petits regards vers la caméra, fait part de sa profonde gêne : ça ne se dit plus tout ça aujourd’hui, et puis on nous regarde, enfin. On voit où le film veut en venir, jusqu’à une scène dont la désinvolture laisse coi. Alors que Willy, le nez en sang, est aidé par Florence dans les toilettes du restaurant, le premier tente soudainement, sans que sa collègue ait manifesté la moindre marque de désir à son égard, de l’embrasser. L’actrice recule, le regarde durement, et lui balance qu’elle pourrait le « canceler » au regard de ce qu’il a fait.»
 
Josué Morel. Critikat

«Être conscient = être au sein d'un ensemble de relations. L'objet que l'on fixe du regard est, tout au plus, à demi conscient. Seules les relations qui s'y rattachent produisent l'expérience consciente -et c'est déjà, en fait, le connaître-
Considérer = analyser et synthétiser. Souvent, l'on se contente de jeter un coup d'oeil, d'écouter vaguement.»

Journaux. Robert Musil. Seuil (1981)

Visionnage domestique toulousain (251)

 
L'étrange affaire Angelica. Manoel de Oliveira (2010)
 
«Oliveira compose le film comme on peint un tableau : il est habité de symboles, de métaphores. Sa conception du cinéma n’est pas celle de la captation, mais bel et bien celle de l’écriture. Lâchant des figures (un mendiant, des travailleurs, un oiseau, un groupe d’enfants) dans le film comme autant d’énigmes, le cinéaste nous laisse le soin d’interpréter, de recouper, d’échafauder des théories – »
 
Théo Ribeton. Critikat

lundi 4 août 2025

«Vous êtes accusé de sexisme, de misogynie, d'insulte aux femmes, de calomnie à l'encontre des femmes, de diffamation des femmes, et de séduction cruelle, délits qui font tous l'objet de peines extrêmement sévères. Les gens de votre espèce ne peuvent espérer la moindre bienveillance s'ils sont reconnus coupables d'avoir infligé aux femmes d'immenses souffrances et une extrême humiliation -une humiliation à laquelle ce n'est que maintenant qu'elles échappent, grâce aux efforts inlassables de tribunaux tels que celui-ci.»

Tromperie. Philip Roth. Gallimard (1994)

samedi 2 août 2025

 

J’ai passé beaucoup de temps à Naples cet été-là. J’adore l’énergie de cette ville. Les Napolitains ont une façon de vivre très différente de tout le reste de l’Italie. Les bords de mer sont très populaires, pas du tout snobs ou bourgeois. Sur les plages, il y a les mamas, les jeunes, les vieux, tout le monde se mélange.
Mais, quand on dépasse le petit port de Mergellina, il commence à y avoir des bains privés, c’est-à-dire des plages dont l’accès est réservé. En entrant dans le club, cela permet d’avoir une cabine de bain, un parasol… C’est une sorte de communauté.
Ce jour-là, en me promenant, je suis passé devant un de ces clubs, dont on apercevait l’entrée depuis la route: il y avait une grande esplanade, des colonnes et derrière, la mer. Tout d’un coup, je vois cette fille, appuyée sur une colonne. Je rebrousse chemin – j’avais déjà fait 200 mètres –, et je la vois: les bras derrière le dos, elle portait un maillot de bain noir, une pièce, elle avait les cheveux noirs.
C’était pour moi l’incarnation de la beauté absolue, la beauté napolitaine. En plus, elle portait un maillot qui est, dans mon esprit, typique du cinéma italien. Les actrices que j’adorais avaient souvent des maillots de bain noirs une pièce: Claudia Cardinal dans ‘La fille à la valise’ ou encore Silvana Mangano…
Mon cœur s’est mis à battre et je me suis vraiment dit qu’elle m’appelait, qu’il se passait quelque chose de fort. J’empoigne mon appareil – à l’époque, j’avais un Canon en plastique, autofocus, pour amateur. Et je me dis, allez, hop, fonce.
Je ne regarde même pas le gardien à l’entrée, qui ne me dit rien d’ailleurs. Je devais être tellement sûr de moi! Je me dirige vers cette fille et, en avançant, je me dis que je suis dingo, je me demande ce que je vais lui dire… Elle, elle continue à me regarder et, à cet instant, je pense qu’elle a compris que ce moment était important et qu’elle allait me l’offrir.
Je me suis approché d’elle et je lui ai dit: ‘Tu sei bella.’ C’est complètement idiot… Mais bon… je ne savais pas quoi dire d’autre.
Finalement, je fais ma photo, je tourne la tête et je m’aperçois qu’à côté, il y a son groupe de copines qui regarde la scène et elles se mettent toutes à rigoler. On se marre ensemble. Rien à voir avec le moment précédent, presque mélancolique.
Dans cette photo, je crois que la fille me donne son adolescence perdue, ce moment où elle va devenir une femme. C’est une photo troublante.

Claude Nori

vendredi 1 août 2025

Quelques Éléments supplémentaires de la Société du Spectacle (85)

«Il existe entre les Jeunes-Filles une communauté de gestes et d'expression qui n'est pas émouvante.»
 
Premiers matériaux pour la théorie de la jeune-FilleTiqqun. Mille et une nuit. (2001)
 
photo de Louise Brooks

«On voudrait savoir quel est celui des deux sexes qui ait plus de raison de s'intéresser à l’œuvre de chair par rapport au plaisir qu'il ressent à l'exercer. On a toujours dit que c'est le féminin. Homère a fait naître une dispute entre Jupiter et Junon ; Theresias, qui avait été  femme, prononça une sentence vraies, mais qui fait rire, parce qu'il semble qu'on ait mis les deux plaisirs sur une balance. Une raison sommaire a fait dire aux praticiens que le plaisir de la femme doit être plus grand, puisque la fête se fait dans sa propre maison, et cette raison est très plausible, car avec toute sa commodité, elle n'a besoin que de laisser faire ; mais ce qui rend la vérité palpable à un esprit physicien est que si la femme n'avait pas plus de plaisir que l'homme, la nature ne l'intéresserait pas à l'affaire plus que lui ; elle n'aurait pas plus de besogne que lui, et plus d'organes ; car, quand ce ne serai que cette bourse qu'elles ont entre l'intestin rectum et la vessie, qu'on appelle matrice, et qui est absolument une partie étrangère à son cerveau, et par conséquent indépendante de la raison, il est certain qu'on peut bien concevoir la possibilité de la naissance de l'homme sans qu'un mâle l'ait semé, mais jamais sans qu'un vase  l'ai contenu et réduit en état de pouvoir résister à l'air avant que de sortir à la lumière.»

Histoire de ma vieJacques Casanova de Seingalt. Bouquins Robert Laffont (2006)