«L'obscurité gagne peu à peu la cuisine. Hilde continue de parler. Elle raconte la chute de Berlin, l'occupation par les Soviétiques ; la famine, la mort, les viols ; sa chance d'avoir survécu, ne pas avoir sombré dans la folie comme tant d'autres. Elle raconte encore le retour des hommes, leur refus d'entendre l'enfer enduré par les femmes ; le silence désormais imposé aux Berlinoises ; l'obligation qui leur est faite d'oublier. Elle s'exprime sans la moindre sentimentalité, sas se plaindre et sans haine, comme s'il ne s'agissait pas d'elle mais d'une étrangère. Roxanne et Claire l'ont écoutée en silence, sans jamais l'interrompre. Elles savent que tout cela est vrai. Elles ont compris d'instinct qu'elles ne devaient pas exprimer de la compassion sous peine de blesser Hilde, peut-être de l'humilier. Enfin Hilde se tait.»
Mon enfant de Berlin. Anne Wiazemsky. Gallimard (2009)
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