«Ma cervelle était dans un tel état d'aficion qu'il me fallait sur l'heure soulager la fièvre excessive, le trop-plein mugissant -je parvenais mal à contenir les exclamations rauques qui me montaient aux lèvres sitôt qu'imaginant un taureau venir à moi, je tendais la main vers lui, le citais et l'accueillais dans ma paume avant de le faire passer, en mimant la passe en son entier. Cela pouvait me prendre à tout moment, dehors, dans le salon, dans un couloir. J'essayais bien de masquer ma pulsion, mon geste, d'étouffer le murmure qui s'échappait néanmoins de ma bouche, mais la maison était vaste, avec beaucoup de portes que je ne pouvais contrôler toutes, et je me faisais surprendre. Les parents de Rose me connaissaient assez mal encore. C'était la première fois qu'ils me recevaient chez eux. Marie-Ange, la mère de Rose, dont l'accueil débordait de chaleur enthousiaste, aperçut mon petit cérémonial. Son beau sourire fut un instant suspendu interloqué. Elle me questionna, rieuse et curieuse, mais devant ma confusion, détourna son attention vers les préparatifs du repas. Romuald, le père, craignant de me gêner fit mine de ne rien voir. Rose hésitait entre l'humour et l'exaspération.»
Matamore. Denis Podalydès. Seuil Archimbaud (2010)
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