«Au début de mon premier semestre à l’école Skinner, ma maîtresse s’appelait Mrs Deway. C’était une lointaine parente de l’amiral Deway, héros de Manille. J’étais bon élève, studieux, mais
sans vouloir nuire à personne, ni penser à mal, j’étais quand même un peu trop
bizarre, et faisait dans la salle de classe des bruits bizarres, avec ma
bouche, mon nez, et ma gorge, ce qui irritait fort tous les autres élèves,
filles et garçons. Je pensais, moi, qu’ils trouveraient ces bruits
amusants ! Qu’ils riraient ou poufferaient, au lieu de quoi ils me
lançaient des regards insolents, et haineux. Certains ont dit alors que si je
n’arrêtais pas ces bruits, ils s’occuperaient de moi après les cours et à plusieurs. Cela accompagné des regards les
plus haineux et les plus noirs. Je les ai mis au défi. Au bout de
plusieurs mois ce comportement a fini par causer mon renvoi de l’école. Les
autres élèves étaient content car ces bruits stupides les avaient vraiment
irrités et poussés à bout. En vérité, ils n’aimaient pas du tout ce concert
idiot. Quelques-uns d’entre-eux ont essayé de me rosser mais je savais me
défendre avec le grand bâton que j’avais toujours avec moi. Et cela donnait de
bons résultats. Ma maîtresse avait dit qu’ils n’avaient rien fait de tel, et
que c’était la classe la mieux élevée à laquelle elle ait jamais enseignée. Si
j’avais été renvoyé, c’est que je les avait vraiment ennuyés. Je ne sais, ni ne
me rappelle combien de temps je suis resté sans aller à l’école, après avoir
été renvoyé, mais lorsque l’un de mes prêtres m’y a ramené en leur demandant de
me redonner une chance, l’administrateur ou le directeur m’a autorisé à
revenir. Mais elle m’a averti très sèchement, et non sans colère que si je me
livrais encore à ces bruits, je serai renvoyé pour de bon. Comme j’avais
complétement oublié, et que je ne me souvenais pas des bêtises que j’avais
faites, je n’ai pas compris pourquoi elle me parlait sur un ton si mauvais. J’aurai volontiers protesté mais le père Minet, m’a
lancé un regard qui me signifiait clairement d’être prudent. Cependant, j’ai
réintégré l’école, je ne me souvenais toujours pas de ce que j’avais fais
d’incorrect la première fois. Mais croyez moi, le ciel le sait bien, j’étais à
présent l’un des élève le plus sage. »
L’Histoire de ma vie. Henry Darger. Aux forges de Vulcain (2014)
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